Il y a cette semaine cent ans que Woodrow Wilson prêtait le serment de Président des États-Unis. Il n’avait été élu qu’avec 41,8% des voix en raison d’un partage des suffrage chez les Républicains entre le président sortant William Howard et le précédent président, Theodore Roosevelt.
Pour beaucoup d’historiens l’élection de Wilson a marqué un tournant dans l’histoire de l’Amérique. Les idées de l’ancien professeur de science politique sur le gouvernement et la nature humaine (ainsi que sur les rapports des citoyens avec le pouvoir) formèrent les bases de l’ancrage à gauche du Parti Démocrate. Les historiens reconnaissent un aspect sinistre de sa personnalité : il éprouvait une profonde détestation envers les immigrants, spécialement les catholiques, et envers les Noirs américains.
Wilson était un disciple de Hegel et professait que l’Histoire est une base incontournable de progrès. L’amélioration de la condition humaine et l’avancement du progrès nécessitaient selon Wilson des dirigeants compétents et « désintéressés » dans un « État rationnel ». (C’était au bon vieux temps, avant que les théoriciens du « choix du public » révèlent que les dirigeants, comme quiconque, pouvaient éprouver certaines formes d’intérêt.)
Wilson plaidait pour une Constitution vivante, « Darwinienne par sa structure comme par son fonctionnement ». Selon lui, un gouvernement n’était pas « une machine, mais un être vivant… s’adaptant à son environnement, rendu nécessaire par les tâches qui se présentent, modelé pour adapter ses fonctions selon la pression des événements. »
Le citoyen doit « confier ses besoins à l’État ». Wilson rejetait donc les termes de la Déclaration [d’Indépendance – 1776] selon lesquels les droits sont octroyés par le Créateur. Wilson soutenait que « si vous voulez vraiment comprendre la Déclaration d’Indépendance, sautez-en la préface. Cette introduction rhétorique n’en est que le moindre élément. »
Wilson rejetait également les arguments du Federalist Paper selon lesquels les contrôles et bilans sont indispensables en raison des insuffisances humaines qui ne s’amélioreront guère.
Le philosophe politicien Ronald Pestritto a noté que pour Wilson « La séparation des pouvoirs, et autres précautions prises par les Fondateurs contre le danger des factions se mettaient en fait en travers de l’action du gouvernement, qui agissait selon les besoins dictés par le progrès. »
Wilson adhérait à l’opinion Social-Darwiniste selon laquelle la survie était méritée par les plus doués, et il était partisan de l’eugénisme. Il croyait qu’il y avait des « races supérieures », telles l’Anglaise et l’Aryenne, sous des régimes éclairés, et des « nations stagnantes » — d’Europe de l’Est et du Sud — ayant besoin de régimes forts pour les guider.
Wilson méprisait la politique de reconstruction d’après la guerre de Sécession, qui promouvait la participation des Noirs à la vie politique. « Les Blancs du Sud — écrit-il dans son Histoire de l’Amérique — s’étaient soulevés par simple instinct de survie pour se débarrasser par tous les moyens des pesanteurs gouvernementales intolérables infligées par le vote de nègres ignares sous la férule d’aventuriers avides. »
Une fois élu président, Wilson rétablit la ségrégation dans l’administration fédérale.
Quant à l’Église catholique, Wilson en parlait comme d’un « organisme qui, quelles que soient les circonstances, met l’obéissance à ses règles au-dessus des lois de l’État. »
Wilson était hostile à la nouvelle vague d’immigrés catholiques franchissant les grilles d’Ellis Island [Ile de la baie de New York où transitaient les candidats à l’immigration]. Il remarquait un « changement de nature de la population que les experts considéraient avec inquiétude ». Ce n’étaient plus les robustes Européens occidentaux, selon Wilson [NDT: il emploie un terme parfois synonyme de « cheptel »] mais des hommes de catégorie inférieure issus d’Italie du Sud, et des hommes de qualité médiocre venant de Hongrie et de Pologne, non qualifiés, sans énergie ni initiative, peu doués intellectuellement.
Au cours de la campagne électorale de 1912 l’Association Américaine de la Presse en langue étrangère publia une attaque contre Wilson: « Un homme au cœur de pierre comme Woodrow Wilson, qui dénigre ses semblables parce qu’ils sont pauvres, souvent sans amis, venus dans notre pays pour y trouver un travail honnête et devenir de bons citoyens, un tel homme n’est pas apte à présider les États-Unis.»
Ces accusations semblèrent avoir de l’effet. Un sondage auprès de 2300 prêtres dans les centres urbains à forte implantation catholique révéla que 90% des prêtres italiens, et 70% des polonais voteraient pour le candidat du Parti Progressiste [symbolisé par l’élan, ou orignal] Theodore Roosevelt.
Au cours de sa présidence Wilson eut des relations orageuses avec l’Église catholique romaine. De nombreux catholiques furent catastrophés lorsque Wilson reconnut le gouvernement Mexicain du Président Venustiano Carranza. La hiérarchie (catholique) déclara que les États-Unis ne devraient pas soutenir un gouvernement qui restreignait la pratique publique du catholicisme. La revue des jésuites, America, fustigeait Wilson, traitant Carranza de « scélérat, destructeur, menteur et assassin ».
L’historien catholique Theodore Maynard citait le comportement grossier de Wilson à l’égard de la hiérarchie (catholique) :
« Ce fut pour le Cardinal Gibbons, âgé de quatre-vingt-trois ans, un véritable choc quand, visitant le Président, il fut congédié en quelques minutes, sans même être invité à prendre un siège. L’apprenant , l’Archevêque Ireland qui se préparait à une visite à la Maison Blanche, déclara « il ne ma traitera pas de cette manière » — et pourtant il eut droit au même manquement. »Quand le Président Wilson partit pour l’Europe en 1919 pour établir un nouvel ordre mondial au Congrès de Versailles, les catholiques de souche européenne étaient à juste titre inquiets du sort qui serait réservé par les vainqueurs alliés à leurs pays d’origine. Les espoirs et les rêves des catholiques furent vite balayés. Pour faire accepter sa précieuse « Société des Nations » Wilson abandonna à Versailles sa puissante rhétorique et ses idéaux, et se mit à dos la plupart des catholiques en cédant aux exigeances vengeresses des dirigeants vainqueurs. Il planta les germes de la Seconde Guerre mondiale en redessinant les frontières d’Europe de l’Est sans tenir compte des origines ethniques ou religieuses de millions de gens. Voici un siècle que Woodrow Wilson a posé les fondations d’un État-nounou qui se passe de Dieu et emploie « tous les moyens… de perfectionnement de la société. » Et de nos jours, l’héritier idéologique de Wilson, Barack Obama exécute son projet grandiose en proclamant que la Déclaration d’Indépendance et la Constitution sont des reliques du lointain dix-huitième siècle et en cherchant à mettre tous et tout — y-compris les organismes religieux — sous la coupe de l’État. Source : http://www.thecatholicthing.org/columns/2013/woodrow-wilson-big-government-anti-catholic.html Caricature : L’air du temps sous Wilson.