Que devons-nous faire? - France Catholique
Edit Template
La justice de Dieu
Edit Template

Que devons-nous faire?

Copier le lien

Dans la liturgie du troisième dimanche de l’Avent, nous entendons les paroles de Jean Baptiste. Il y a 2000 ans, des foules venaient vers lui et lui demandaient : « que devons-nous faire ? » Il répondait : Que celui qui a deux tuniques partage avec celui qui n’en a pas. Et que celui qui a de la nourriture fasse de même. »

Habituellement, nous ne faisons même pas ce simple minimum. Cependant, pour nous à ce moment de l’histoire occidentale, un autre point crucial est le fait que Jean ne plaide pas pour un système de redistribution où un troisième acteur, en l’occurrence le gouvernement, déciderait arbitrairement combien il vous est permis d’avoir, et combien on va vous prendre – puis utiliserait ce qu’il vous prend pour acheter des votes.
Jean n’était pas le messager du théisme religieux que l’on trouve dans l’individualisme économique du parti libéral moderne au cœur des idéologies de la redistribution. Un tel individualisme signifie que, comme le dit l’historien Glenn Olsen dans  Le retour vers la transcendance, « avec Locke, l’ami de la société traditionnelle a disparu. …(et) un égalitarisme mal défini et abstrait , toujours expérimenté superficiellement, s’est développé aux dépens des formes concrètes de l’amitié, ces choses profondes qui depuis des temps immémoriaux, ont constitué nos sociétés villageoises et de voisinage. »

Le message de repentance de Jean au contraire est frappant car il devait conduire les gens à partager ce qu’ils avaient par amitié. Avec la venue du Christ, ceci s’exprimerait en termes d’amour, non pas l’amour émotion, mais l’amour qui travaille au bien de l’autre. La prédication de Jean, toutefois, n’a pas été supplantée.

Dieu n’a pas proclamé un Dieu hors de l’histoire (Théisme), mais un Dieu qui à travers son « Oint » est présent dans notre histoire et « vous baptisera par l’Esprit Saint et par le feu. Il tient dans sa main la pelle à vanner pour nettoyer son aire. » En d’autres termes, Il jugera l’histoire. Jean comprenait l’histoire humaine comme la scène où Dieu jugerait tout ce qu’il a créé.
Une telle histoire implique un monde sacramentel – qui embrasse le monde plus totalement que celui de la technologie où nous semblons bloqués – car « toute créature parle de Dieu et se tient avec Lui dans une relation asymétrique qui est la participation de la créature à la relation asymétrique mais réciproque des personnes de la Trinité »( Olsen)

Le jugement de chaque individu et de l’histoire se ferait selon le succès de chacun à agir selon la nature sacramentelle de la réalité qui nous entoure « quoique vous fassiez au plus petit d’entre les miens, c’est à moi que vous l’avez fait. » (Matt. 25 ; 40) Le « moi », bien sûr, c’est Jésus Christ.
Alors les collecteurs d’impôts ont demandé : « Que devons-nous faire ? » Jean répondit : « Ne collectez que ce qui est prescrit ». Leur question était liée à leur venue pour se faire baptiser. Le baptême de Jean était un baptême de repentance, et le fait de collecter les impôts avec justice et de façon responsable signalerait que ces publicains se repentaient vraiment.
Ils n’allaient pas réclamer plus qu’il n’était prescrit. Ainsi, le fait que la société était monétisée ne se traduirait pas par une occasion de vol. (Par contraste, nous avons appris récemment que des centaines d’employés à Washington D. C. avaient été pris à se faire payer des salaires et en même temps des allocations chômage.)

D’un autre point de vue, les collecteurs d’impôts respecteraient les gens dont ils recevaient les taxes. Ils soutiendraient l’intégrité de la société car la société des hommes était et est plus qu’une source de revenus pour les autorités. Elle est composée d’êtres humains qui nouent toutes sortes de relations, dont certaines sont rentables.

En troisième lieu, il y avait des soldats qui venaient se faire baptiser. Ils lui demandaient : « que devons-nous faire ? » Et Jean répondit : « Ne pratiquez pas d’extorsions, n’accusez personne à tort, et contentez-vous de votre solde. »

Les soldats portaient des armes et étaient exercés à les utiliser. Ils étaient donc une force avec laquelle il fallait compter. L’armée était un élément particulier de la société, qui, si elle fonctionnait convenablement, malgré un ordre social hiérarchisé, permettait aux gens de vivre une vie commune paisible.

J’ai insisté sur les différentes sortes de sociétés qui sont à la base des réponses de Jean Baptiste car nous vivons dans une culture qui n’est que très vaguement connectée à sa prédication. Avec Locke et sa «  quête d’une société civile distincte de l’Eglise et des liens ‘ irrationnels ‘ de la famille et des amis traditionnels », nous nous sommes transformés en une collection de monades qui ont besoin d’être insérées de force dans un quelconque corps organisé.

Du coup, selon Glen Olsen, « l’amitié traditionnelle, dont une des formes pourrait être le mariage, a été basée non sur l’égalité, mais sur la complémentarité, sur le fait que les différences naturelles conviennent à la société, et sur la façon dont les différences naturelles pressent et font avancer la coopération sociale. Alors que maintenant, la grande revendication serait : Tous pareils, tous interchangeables ».

A partir du moment où nous acceptons un gouvernement qui traite les réalités humaines avec un égalitarisme grossier, au lieu de les traiter telles que Dieu les a créées, nous n’aurons qu’à en cueillir les conséquences. En effet, quand nous renions Dieu, la révélation qu’Il fait de Lui-même à travers son Fils et sa création, nous renions la conception aux multiples facettes de la société humaine.

Parmi nos différents sujets de réflexion, voici quelque chose qui vaudrait la peine d’être médité pendant l’Avent.


Bevil Bramwell, prêtre, oblat de Marie Immaculée, enseigne la théologie à l’Université Catholique en ligne. Il a un diplôme de Boston College, et travaille dans le domaine de l’ecclésiologie.

— –

Source : http://www.thecatholicthing.org/columns/2012/what-should-we-do.html


Tableau : Jean Baptiste par Bartolomeo Veneto, c. 1550