L’incontestable succès des manifestations du 17 novembre constitue une belle leçon d’espérance. On pouvait douter de la possibilité d’une réaction cohérente dans les profondeurs populaires à un projet de loi ouvrant le mariage aux couples du même sexe, alors que tout concourait à une disqualification ou à une mise hors jeu de toute opposition. Depuis des années, les instituts de sondage enregistraient une approbation sans cesse renforcée au mariage homosexuel et même à l’adoption par les couples dits homoparentaux. Il semblait que la révolution culturelle, à l’aune d’un progressisme forcément irréversible, emportait tout et que la velléité d’un refus était condamnée à la marginalisation fatale.
Bien sûr, il y avait là-dessous une dialectique à la fois spécieuse et terrorisante, qui, puissamment relayée par les médias, visait à isoler notamment la communauté catholique, en la délégitimant et même en la disqualifiant. Cette logique se trouve désormais prise en défaut par un mouvement populaire de fond, jeune, familial, décomplexé, qui s’est même trouvé des alliés précieux chez des homosexuels récusant l’embrigadement. Il est remarquable aussi que ce mouvement ait désamorcé les pièges où on voulait le précipiter, à coup de provocations. Les médias ont été obligés d’en convenir, et c’est un pas important qui a été franchi pour la conquête de l’opinion. Car la véritable bataille se joue sur ce terrain, et elle sera acharnée dans les prochaines semaines. La question consiste à mettre en valeur les vrais enjeux d’une législation du mariage, qui sont à distinguer du droit à la sécurité d’une partie de la population et des problèmes inhérents à des situations singulières que l’on peut traiter sans remettre en cause les principes fondateurs.
À partir de là, se profilent d’autres enjeux d’une gravité indicible, car la perspective d’une procréation assistée au gré de demandes erratiques peut aller à son terme avec l’instrumentalisation biologique la plus brutale et même la possibilité d’une fabrication des enfants dans l’anonymat des références et des appartenances.