Amen, mes sœurs ! - France Catholique
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« Ô Marie conçue sans péché »
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Amen, mes sœurs !

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L’ouvrage de Colleen Carrol Campbell Mes sœurs les saintes : mémoire spirituel (paru le 30 octobre aux Etats-Unis), exprime l’insatisfaction quant aux « réponses toutes faites fournies aussi bien par les féministes laïques que par les critiques anti-féministes ».

L’auteur cherche implicitement un modèle de ce que le Bienheureux Jean-Paul II (dans Evangelium Vitae) appelle « le nouveau féminisme » et qu’il décrit comme un féminisme culturellement transformé qui n’imite pas les modèles de la domination masculine mais s’inspire de « l’authentique génie des femmes dans tous les aspects de la vie et de la société ».

Campbell organise son livre autour de l’intuition de femmes décédées qui semblent transmettre leurs leçons de vie victorieuses mais durement apprises par le canal de cette talentueuse rédactrice. La communauté des femmes vénérables selon Campbell inclut un quatuor de Thérése — d’Avila, de Lisieux, de Calcutta, d’Allemagne (Sœur Thérèse Bénédicte de la Croix, alias Edith Stein) ainsi que Sainte Faustine de Pologne et Marie de Nazareth.

N’y a-t-il pas moyen pour une femme de foi d’être une femme libérée — une féministe ? Cet amoureux de la vie partage la passion de Campbell pour recadrer les débats privés et publics souvent houleux qui découlent de cette question.

Pour atteindre l’idée médiévale de « l’unité de la foi », nous ne pouvons pas d’un côté ignorer le dilemme de la conciliation des principes du mouvement contemporain des femmes — contraception, droit à l’avortement, méfiance envers la pratique religieuse — avec nos propres perspectives de foi. Non plus que nous ne pouvons de l’autre côté donner une rapide absolution à la compréhension de « l’intention positive » à l’origine de la critique de nos positions.

Je ne gâcherai pas le plaisir du lecteur en révélant comment Mme Campbell résout cette difficulté, mais d’autres vraies questions se posent. Cette femme parviendra-t-elle à échapper aux ravages du féminisme radical ? Ses parents resteront-ils de marbre tandis que leur géniale, brillante, bien élevée et catholique de fille mène une curieuse double vie : étudiante sérieuse le jour, habituée de week-ends de débauche la nuit – à l’université catholique de Marquette ?

Campbell porte témoignage des affres de l’agonie d’une culture américaine qui autrefois aspirait en majorité à la vertu. Elle témoigne de Marquette à une époque où elle ne pouvait pas croquer les soirées étudiantes et leurs conséquences dans les formes les plus basiques du cinéma vérité – Facebook et You Tube. Elle l’a fait à l’ancienne : en tenant un journal.

Dans Mes sœurs les saintes, elle se révèle comme une femme à la conscience délicate, dotée d’honnêteté intellectuelle et d’humilité spirituelle. Elle prend en considération des péché que, j’ose le dire, la plupart des prêtres au confessionnal considèreraient comme plus véniels que mortels.

Cependant, elle écrit ceci dans les premiers jours de la culture « hookup » : « quand il a été question du sexe, j’ai appliqué à la lettre la loi qui m’avait été enseignée dans mon foyer catholique : pas hors du mariage – la loi mais pas l’esprit. »

Le miracle dans tout cela, c’est que malgré les fréquentes visites de l’étudiante Colleen dans les tanières tonitruantes des jeunes étudiants et étudiantes – et de la journaliste Carroll dans l’environnement presque aussi chargé en décibels d’un rédacteur de discours de la Maison Blanche – elle n’est jamais devenue sourde.

Même si mademoiselle Carroll à cherché (avant de devenir madame Campbell) le réconfort temporaire de ce que Christopher West nomme « l’évangile fast food », elle entendait toujours le murmure de l’Esprit Saint. Au coeur de son inévitable vague à l’âme, elle a gardé la force de répondre à ses incitations, de garder l’assurance que l’amour généreux de Dieu continuerait de briller dans notre obscurité personnelle.

Elle a enduré la remise en place du sens du péché dans son âme, le tourment de la démence de son père, et avec son époux, la tristesse partagée d’un diagnostic d’infertilité. Mais il y a eu aussi des prières exaucées.

Cette dame connait les agonies et les extases du Chemin de Croix. Campbell aspire à nous aider à découvrir par nous-mêmes « la vérité consolante trop souvent oubliée à notre époque individualiste : le pélerin qui cherche Dieu ne voyage jamais seul. »

Ecrivant sur la constance de ses parents à veiller à son salut et celui de ses frères et soeurs, elle rappelle à cette mère le pouvoir de la prière parentale. Nous pouvons tous imiter une autre sainte soeur – Monique, la mère du réticent Augustin – dans la constance de nos prières pour nos enfants (et conjoints), peu importent leur avancée et la nôtre sur le chemin du salut.
Malgré des tendances perfectionnistes avouées, Mme Campbell avoue ses péchés, bien que jamais de façon malsaine. Elle porte témoignage de son parcours — de l’humiliation à l’humilité — et met en évidence les grâces divines à l’oeuvre dans sa vie.

Elle invite ses lecteurs à faire comme elle : prendre le temps d’écouter, permettre à la vie d’adoucir plutôt que de durcir nos coeurs, et revenir à la prière.

Une de mes propres saintes sœurs par le cœur est une anachorète du XIVe siècle, Julienne de Norwich. Ce qu’elle a écrit sur la fidélité de l’Amour est mon résumé de ce que Colleeen Carroll Campbell a atteint en son temps avec ce mémoire évocateur et franc :

Bien que nous continuions à pécher, il continue de nous aimer sans cesse, et il nous montre nos fautes avec tellement de douceur que nous nous repentons paisiblement, tournant notre âme vers la contemplation de son pardon, nous accrochant à son amour et à sa bonté, sachant qu’il est notre salut, comprenant que nous ne pouvons que pécher.

Dame Julienne dit que s’il y a un amoureux de Dieu sur terre à l’abri de la chute, cela ne lui a pas été révélé dans ses visions :« mais ceci était clair : en tombant et nous relevant de nouveau nous sommes enveloppés toujours plus étroitement dans l’unique Amour. »

Amen, mes sœurs !


Karen Walter Goodwin est productrice avec plus d’une douzaine de spectacles de Broadway à son actif. Elle est fondatrice de Fifth Avenue Entertainment et est membre du département des affaires économiques et du conseil consultatif de l’Université Catholique d’Amérique, où elle est professeur-adjoint.

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Photo : Colleen Carroll Campbell

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Source : http://www.thecatholicthing.org/columns/2012/amen-sisters.html