Je m’informe à propos de la série télé Ainsi soient-ils. Je lis l’excellente chronique du père Thierry-Dominique Humbrecht dans Le Figaro. Et je m’interroge. Pourquoi suis-je blessé par le sujet de cette série et ce qu’on m’en décrit ? N’est-ce pas le droit d’un artiste que de se saisir de toute l’épaisseur psychologique de notre humanité ? Et puis est-ce la première fois qu’on traite de la condition sacerdotale ? Il y a eu des précédents dans la littérature, au cinéma. Évidemment, tout dépend du regard de celui qui veut explorer le fond des âmes. N’est pas Bernanos qui veut. Je pense évidemment au romancier du Journal d’un curé de campagne, mais il n’y a pas que ce chef-d’œuvre à prendre en considération. Le prêtre est partout dans l’œuvre bernanosienne, et singulièrement déjà dans le premier des romans Sous le soleil de Satan. Sous le Soleil de Satan dont Maurice Pialat a fait un film et où Gérard Depardieu est pleinement entré dans le personnage de l’abbé Donissan.
Tiens ! Depardieu me fait penser à Belmondo, qui, lui aussi, avait admirablement joué le rôle de Léon Morin, prêtre, dans le film de Jean-Pierre Melville, d’après le bon roman de Beatrice Beck. Je me souviens d’avoir été épaté. Je n’aurais jamais cru Bebel capable d’une telle performance. Mais voilà, nous avons affaire à une littérature et un art supérieurs. Où le mystère du sacerdoce est approché avec infiniment de respect et de délicatesse. Cela ne veut pas dire que tous les prêtres présentés soient des curés d’Ars. Journal d’un curé de campagne se termine par la rencontre du prêtre avec un ancien confrère qui a quitté le sacerdoce. J’ai aussi en mémoire un roman de Graham Greene qui se passe au Mexique, avec un prêtre qui n’a rien d’un modèle de vitrail. Au contraire, ce serait même un anti-modèle. Et pourtant l’auteur de La Puissance et la Gloire est parvenu à nous persuader qu’en cet homme déchu rayonnait encore la grâce d’un sacerdoce qui le dépassait. Rien de semblable dans Ainsi soient-ils ? Mais oui, c’est toute la question !
Chronique lue sur Radio Notre-Dame le 16 octobre 2012.
Episode 1
Episode 2
La critique de Marie-Christine Renaud d’André :
FRANCE Catholique n°3322 du 5 octobre 2012, page 35
Toujours à l’affût de héros récurrents autres que les médecins, policiers, instituteurs ou pompiers, les scénaristes de cette nouvelle série se sont intéressés à des séminaristes.
Ils sont cinq (Yann, le Breton naïf, Raphaël, le fils de famille, Emmanuel, l’étudiant en archéologie, Guillaume, responsable trop jeune de sa mère et de sa sœur et, enfin, José, à peine sorti de prison pour meurtre) à intégrer le séminaire des Capucins.
Avec un tel sujet, on pouvait craindre le pire, et déjà la toile s’enflamme au sujet d’une série qualifiée d’anticatholique. Pourtant, mis à part quelques poncifs inévitables aujourd’hui (le Vatican vit dans un luxe inouï, le président de la Conférence des évêques est ignoble et passe son temps à ourdir des complots, etc.), cette œuvre montre un reél respect pour ces jeunes qui s’engagent sur un appel de Dieu. Les personnages des séminaristes sont très sympathiques, même si chacun est tourmenté par des démons intérieurs (à chacun le sien, bien entendu !). L’histoire se suit sans ennui (sauf le premier épisode plutôt raté). Mais il est dommage que les scénaristes n’aient pas fait appel à un conseiller qui leur aurait évité nombre d’erreurs dans les comportements et dans les dialogues (accorte religieuse au séminaire, directeur parlant du «métier» de prêtre, etc.). Surtout, les raisons qui ont conduit les personnages à répondre à l’appel de Dieu ne sont pas approfondies.
Si ces défauts et ces poncifs sont agaçants, ils ne font pas oublier les scènes très émouvantes (tel le récit poignant de la conversion de José) ni les beaux sermons. Et ça fait du bien, par les temps qui courent…
Série française en huit épisodes (2012) avec Jean-Luc Bideau (le père Fromenger), Thierry Gimenez (le père Bosco), Michel Duchaussoy (Mgr Roman), Julien Bouanich (Yann Le Megueur), Samuel Jouy (José del Sarte), David Baïot (Emmanuel Charrier) (8 x 0h52). Diffusion à partir du 11 octobre, sur Arte, à 20h50.
Le point de vue de Mgr di Falco
Mgr di Falco : Ainsi soient-ils par KTOTV
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