Cette semaine, lors de la session annuelle de l’Assemblée Générale des Nations Unies, le Secrétaire chargé des relations du Saint-Siège avec les États, Mgr Dominique Mamberti, a prononcé un message remarquable sur les véritables sources des lois et de la justice.
Son discours portait sur un thème soutenu de longue date par le Vatican : les Nations Unies, « référence centrale pour une vraie famille des nations. » Un sentiment qui brillait par son absence dans les déclarations du président Iranien Mahmoud Ahmadinejad et autres membres de sa clique.
À l’appel de Mgr Mamberti en faveur d’une « gouvernance mondiale juste, équitable et efficace » s’ajoutait une mise en garde: « que les institutions nationales et internationales évitent que manipulation et coercition interfèrent dans la vie quotidienne des individus.» En résumé, c’était un appel à la solidarité et à la subsidiarité.
Mais le thème central tournait autour de la recherche de lois conformes à la justice. Pour qu’il en soit ainsi, les lois doivent comporter « un ordre juridique solidement ancré à la dignité et à la nature de l’homme, en d’autres termes, à la loi naturelle. » Il insistait sur les dangers de lois positivistes imposées par un vote majoritaire pour des motifs fonctionnels ou matériels, sans référence à la loi naturelle — ce qu’Aristote aurait appelé « démocratie » dans le sens de « populocratie ».
L’exposé par l’Archevêque du besoin intellectuel et théologique de la loi naturelle était à la fois élégant et persuasif, et les dirigeants de par le monde devraient bien entendre plus souvent de tels messages. Il faut qu’ils entendent les appels pressants du droit à la vie et du plein droit à la liberté religieuse, qui découlent de la loi naturelle.
Cette même semaine dans un cours de politique étrangère, incluant l’étude de la loi naturelle, mes étudiants ont établi une liste de ce qu’ils pensent être les situations de grave crise menaçant actuellement les dirigeants américains. En voici un extrait :
* L’agitation et la violence jaillis au Moyen-Orient en Syrie, en Égypte, en Libye et ailleurs. Certains troubles initialement causés par la corruption et l’oppression des dirigeants ainsi que par les conditions économiques désastreuses se sont changés en mouvement anti-américain et anti-occidental alors que les protestations s’élevaient contre un fim (médiocre et pas vraiment nouveau) sur le prophète Mahomet. La France et l’Allemagne ont fermé par précaution leurs ambassades dans le monde musulman après la publication de caricatures de Mahomet dans certains de leurs journaux. De plus, Al Qaïda semble avoir conservé assez de moyens pour fomenter l’assassinat de l’ambassadeur Américain en Libye le 11 septembre dernier. Aux Nations Unies, les chefs du « Printemps arabe » Égyptien et Yéménite ont rejeté l’appel du Président Obama à la liberté d’expression si de telles expressions offensent l’Islam.
* Le déni par l’Iran du droit d’exister de l’État d’Israël alors que tout prouve (les rapports de l’A.I.E.A. en font foi) la poursuite par l’Iran des recherches pour se doter d’un armement nucléaire.
* La nette avancée du Président Poutine pour affermir son pouvoir, restreignant les tentatives d’O.N.G. occidentales pour ouvrir un espace à une société civile légitime en Russie. Que Mitt Romney ait raison ou non de dire que la Russie est un adversaire géopolitique des États-Unis n’empêche pas la Russie de voir l’Amérique et l’OTAN comme une menace concrète. L’astucieux et bien informé ministre des affaires étrangères Tchèque Karel Schwarzenberg, lançait cette semaine un avertissement: l’Occident est en train de perdre devant Poutine qui renforce la sphère d’influence de Moscou. Pour lui, la politique de Poutine est davantage tsariste que staliniste.
* Le déploiement croissant de moyens militaires chinois pour faire face au Japon (et autres pays) dans la Mer de Chine du Sud, région vitale pour les communications maritimes et le transport d’énergie, avec en arrière-plan des troubles internes et une récession économique marquée. La Corée du Nord voisine, dont les intentions ne sont pas limpides, demeure un nid nucléaire totalement inhumain.
* Les problèmes économiques et financiers de l’Europe, malgré de nouveaux plans de redressement et des discours ministériels à répétition. L’effort d’après guerre pour rétablir la paix en Europe grâce à l’intégration économique et l’adoption d’une monnaie commune, après des années de folles réglementations par les technocrates de Bruxelles est en panne. Dans l’ensemble, les Européens ne montrent pas plus d’intérêt à renforcer leur défense qu’à un renouvellement des générations (bien que les États-Unis aient vu, au moins temporairement, leur taux de natalité tomber sous le niveau de celui de la France). Une sorte de fatigue politique, économique, et surtout morale, s’est abattue sur ce qui était le monde chrétien.
Ah ! Et encore, le Pakistan qui a l’arme nucléaire. Et les conflits sur les ressources, et l’extrémisme islamiste en Afrique. Et le Venezuela et ses relations avec l’Iran et la Russie. Et le Mexique, un État menacé d’effondrement avec ses milliers de morts dans la guerre de la drogue.
Jamais, de mémoire d’homme, l’anarchie dans les relations internationales n’a été aussi flagrante. L’immense majorité des nations dans ce dangereux cocktail n’a aucune pratique, et n’ éprouve aucun intérêt, de gouvernance selon la foi et la raison nous menant à la loi naturelle.
Et alors que le mépris de la loi naturelle n’est pas une nouveauté parmi les nations, et qu’il y eut bien d’autres époques dangereuses (aboutissant généralement à des guerres), un nouvel élément est apparu: Les États-Unis sont plus que jamais divisés sur la vérité des fondements de la loi naturelle, que les Pères fondateurs américains avaient adoptée comme base de gouvernement. La politique divise le pays, dépréciant les questions les plus essentielles sur la nature de la personne humaine et l’équilibre entre droits et devoirs, et jette le doute sur notre capacité à agir efficacement pour un semblant d’ordre dans le monde et de justice chez nous.
Les paroles de Mgr Mamberti sur la loi naturelle et sur la justice étaient mesurées, mais il y a un danger croissant d’ignorer la vérité qu’elles portaient, et c’est inquiétant. Voici les réalités à affronter alors que va bientôt débuter cette Année de la foi dont nous avons tant besoin. Pour commencer dans la joie, nous pourrions débuter cette année par la lecture, la re-lecture, d’un des meilleurs efforts du patron de Mgr Mamberti: l’Encyclique « Spe Salvi ».
Joseph Wood enseigne à l’Institut de Politique Internationale (Institute of World Politics) de Washington.
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Photo : Mgr. Dominique Mamberti à la tribune de l’ONU.
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http://www.thecatholicthing.org/columns/2012/natural-law-and-the-present-turmoil.html
RESPECTER LES MECANISMES JURIDIQUES DE L’O.N.U.
Cité du Vatican, 3 octobre 2012 (VIS). Le Secrétaire pour les relations avec les états, est intervenu hier devant la 67 Assemblée générale de l’ONU (« Réaliser par des moyens pacifiques l’ajustement ou le règlement de différents ou de situations de caractère international).
Dans son discours, Mgr Domenico Mamberti, a notamment rappelé que « la perte de confiance dans la valeur du dialogue, la tentation de favoriser à priori l’une des parties en cause dans les conflits régionaux et nationaux, mettent en danger le respect des mécanismes juridiques des Nations-Unies. Pourtant, la prééminence des valeurs affirmées par la Charte devrait conduire, au contraire, à l’adoption de tous les moyens possibles pour assurer la protection des plus vulnérables, promouvoir le respect de l’état de droit et des droits de l’homme, ainsi que la sauvegarde des équilibres culturels et religieux multiséculaires…
L’urgence de la situation apparaît de manière d’autant plus flagrante au regard des événements qui ont cours au Moyen-Orient et, en particulier, en Syrie. Il ne peut y avoir de solution en dehors du respect des règles du droit international et du droit humanitaire, ainsi que de la mise en œuvre des mécanismes établis par la Charte des Nations-Unies. Toutes les instances concernées devraient faire en sorte, non seulement de faciliter la mission de l’Envoyé spécial de l’ONU et de la Ligue Arabe, mais aussi d’assurer une assistance humanitaire aux populations en détresse. La communauté internationale doit unir ses efforts afin que toutes les parties impliquées substituent la négociation au recours aux armes et exiger le respect effectif de la liberté religieuse, des droits de l’homme et de toutes les libertés fondamentales… De plus, seule une communauté internationale fortement ancrée sur les valeurs authentiquement conformes à la dignité humaine pourra apporter des solutions viables aux nouveaux types de conflits engagés par des groupes transnationaux, qui diffusent une idéologie hégémonique pseudo-religieuse au mépris des droits des personnes et de la paix civile. Pensons à l’instabilité et aux récents attentats terroristes dans certains pays d’Afrique et d’Asie ou à la collusion entre le narcotrafic et le terrorisme dans d’autres régions du monde…
Il apparaît enfin de la plus grande importance d’apporter une solution effective au débat ouvert sur la réforme et l’amélioration du fonctionnement des organes de l’Organisation des Nations-Unies, afin de raviver sa capacité à prévoir les conflits et à les résoudre par des moyens pacifiques ».