Un journaliste m’interroge pour un site d’information et d’opinions : « Croyez-vous à une montée de la peur à l’égard de l’islamisme en France, à cause des événements violents qui se produisent actuellement dans le monde ? Plus particulièrement, croyez-vous que le sentiment islamophobe risque de grandir dans les milieux chrétiens ? » Pris un peu au dépourvu je réponds de mon mieux, ne discernant pas de vagues particulières d’hostilité à l’égard des musulmans, même si on ne peut exclure une sourde appréhension, qui n’est pas sans motifs. Et puis comme tout le monde, je suis tombé sur l’incident provoqué par Véronique Genest, la très populaire commissaire Lescaut de TF1 : « Si être islamophobe, c’est d’avoir peur, alors je suis islamophobe, comme beaucoup. » Et de poursuivre : « Comme tout le monde je vois les infos, les appels à rétablir la charia, les foules en liesse dans la rue, parfois, quand il y a des attentats. Alors oui, l’islam me fait peur. J’aimerais être rassurée. Quand je me dis islamophobe, c’est comme j’aurais été christianophobe au temps de l’Inquisition, contre l’Église, si vous voulez. »
Voilà au moins qui a le mérite d’être franc et à la limite d’une certaine naïveté. Mais il est vraisemblable que bon nombre d’admirateurs de Véronique Genest partagent ses sentiments. Je ne suis pas d’avis de la stigmatiser, en la soupçonnant de je ne sais quelle haine à l’égard des musulmans. Islamophobie, dit-on. La phobie, étymologiquement, ce n’est pas la haine. Il s’agit d’un sentiment complexe. Littéralement, en grec, c’est la peur. Psychologiquement c’est un réflexe un peu maladif et irraisonné. Par extension, ça devient carrément du racisme. Mais alors là, on tombe souvent dans la caricature. Véronique Genest, comme la plupart de nos contemporains, réagit avec crainte devant une actualité violente et agressive. Le danger serait d’assimiler l’ensemble des musulmans à l’islamisme, alors que la plupart le réprouvent et craignent d’ailleurs qu’il nuise à leur réputation dans l’esprit de leurs compatriotes. Il faut voir le danger là où il est, avec le discernement nécessaire. Un discernement qui évite les amalgames fâcheux et n’entame pas l’estime que nous devons à des gens estimables. Ceux que nous côtoyons tous les jours.
Chronique lue sur radio Notre-Dame le 19 septembre 2012.