L’échéance de dimanche ne saurait être sous-estimée, en tout état de cause. Le général de Gaulle, fondateur de la Ve République, avait voulu que le pays dispose d’une autorité « directement mandatée par l’ensemble de la nation et mise à même de vouloir, de décider et d’agir ». Il s’agissait pour lui de parer aux risques que fait courir à l’État « la multiplicité des tendances qui nous est propre en raison de notre individualisme, de notre diversité, des ferments de division que nous ont laissés nos malheurs ». Certes, on peut s’interroger sur la pérennité de cette fonction arbitrale qui devait aussi nous protéger des déviations idéologiques, des rivalités partisanes et de façon plus générale de l’impuissance des précédentes républiques1. Certains n’ont jamais admis cette « monarchie républicaine » et militent pour une VIe République qui affaiblirait sensiblement le rôle du chef de l’État. Les Français restent néanmoins attachés au principe fondateur et manifestent par leurs suffrages que l’élection du Président constitue l’événement essentiel de la vie nationale.
Il a toujours été difficile, au-delà du Général, de maintenir l’indépendance du pouvoir, les élections traduisant plutôt la division du pays en deux tendances contraires. Mais chez tous les présidents qui se sont succédé, le souci de l’unité a toujours subsisté peu ou prou, et l’expérience de la cohabitation a, par trois fois, renforcé le sentiment d’une solidarité par-delà des divisions. Celui-ci sera-t-il confirmé après le verdict de dimanche ? On peut se poser la question avec insistance. S’il apparaissait que l’exercice de l’autorité publique aboutissait à la transgression de ce qui est supérieur à toute conjoncture, et plus encore à la fluctuation des opinions et à la captation des idéologies, quelque chose de fondamental serait, en quelque sorte, brisé, empêchant une partie du pays de se reconnaître dans un système qui aurait sombré un peu plus vers la dissolution du lien social et la transgression des lois non-écrites. C’est pourquoi il convient de faire des vœux ardents pour que la victoire d’un parti ne sacrifie pas la légitimité profonde de nos institutions.
Pour aller plus loin :
- Le défi du développement des peuples et le pacte de Marrakech - la fuite en avant des Nations Unies
- LA « MODERNITÉ » : UN CENTENAIRE OUBLIÉ
- La France et le cœur de Jésus et Marie
- Sur le général de Castelnau et le Nord Aveyron.
- La paternité-maternité spirituelle en vie monastique est-elle menacée en Occident ?