Oui, pourquoi tant de haines dans cette campagne électorale ? Il n’est pas excessif de dire que les couteaux sont tirés. C’était palpable entre Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen, l’autre soir sur France 2. Mais il n’est pas de jour sans incident plutôt violent. C’est Henri Guaino qui sort de ses gonds face à un interlocuteur qu’il trouve insupportable. Il y aurait tout un choix à faire de citations au vitriol, notamment de la part des porte-paroles des candidats. Najat Vallaud-Belkacem affirme que Nicolas Sarkozy n’a pour seule stratégie que « de mentir et de tricher ». Elle trouve dans le président-candidat, un mélange de Silvio Berlusconi et de Vladimir Poutine, « avec le vide idéologique de l’un et la brutalité des méthodes de l’autre ». Xavier Bertrand de l’UMP est traité dans la foulée de « valet sans morale ». Il est vrai que l’intéressé s’en était pris aussi vertement à François Hollande, qui « aurait une peur panique de déplaire ».
On dira peut-être que c’est la loi du genre et qu’il est très difficile de faire en sorte que tout soit ordonné, courtois, rationnel. J’ai déjà expliqué ici-même qu’il n’était pas possible au débat politique d’échapper à la théâtrocratie et à ses effets de scène. Lorsque s’ajoutent les techniques de la com’, on est pris dans une spirale assez peu contrôlable. De plus, je serais assez d’accord avec Pierre Moscovici, lorsque le bras droit du candidat socialiste affirme que Sarkozy fait une campagne à l’américaine. En ajoutant que le président est un battant qui n’a pas perdu d’avance. Nous assisterons jusqu’au terme de la campagne à une surenchère qui deviendra sans doute de plus en plus âpre, dès lors que les candidats devront faire la différence, donner les coups de boutoir ultimes pour décrocher la part indécise de l’opinion.
Ce qu’il faut espérer tout de même, c’est que les vrais enjeux ne disparaissent pas complètement dans les éclats de la joute oratoire. Il est vrai que la complexité du monde d’aujourd’hui et la difficulté d’y voir clair sont telles qu’il vaut mieux se mettre au calme pour réfléchir. Dans nos journaux, il y a du grain à moudre de ce point de vue, dans des tribunes très sérieuses. Mais le spectacle happe tous les regards et l’on préfère compter les coups. À moins que le voile ne finisse par se déchirer, en deçà du spectacle et de la com’.