Y aurait-il des comparaisons possibles entre les campagnes présidentielles française et américaine ? Les traditions intellectuelles et politiques des deux pays sont très différentes, les procédures électorales également. Sans doute, des évolutions se sont-elles produites en France, dans le sens d’un éloignement de la matrice jacobine qui dominait les structures idéologiques au profit d’un retour au libéralisme, celui qui se réclame de Benjamin Constant et de Tocqueville et qui est beaucoup plus proche des États-Unis et de leurs pratiques démocratiques. Il n’empêche que nous sommes toujours en présence de deux modèles de civilisations (oui, j’ose le terme !) qui déterminent des mentalités forts différentes. Par exemple, le phénomène Rick Santorum est-il transposable chez nous ? Est-il besoin de préciser que ce candidat aux primaires du Parti Républicain trouble en ce moment toutes les données de la prospective et met en émoi les caciques de son propre parti.
Car ce catholique proclame haut et fort les valeurs morales, et il est aussi représentatif de toute une partie de la population américaine qui réagit sur ce terrain là pour décider de ses choix politiques. Notre Christine Boutin pourrait sans doute fournir quelques éléments de comparaison, avec la primauté qu’elle donne à des impératifs moraux qui sont identiquement ceux de Rick Santorum. Mais attention ! Il y a aussi des oppositions qui tiennent à des données proprement américaines. Santorum est aussi un farouche opposant à tout programme écologique. Il va jusqu’à nier le changement climatique, il est favorable à la reprise des forages pétroliers et gaziers. Il est donc libéral en économie, et même ultra-libéral selon nos critères français.
C’est bien pourquoi il faut relativiser les comparaisons, en prenant conscience de la difficulté des engagements en fonction des critères de la morale, voire ceux de l’Évangile. Ceux-ci concernent des questions aussi diverses que celles qui touchent à la vie sociale en tous ses aspects, sans compter les choix dans le domaine des relations internationales. N’empêche que l’émergence d’un Rick Santorum nous intéresse directement, à l’heure où chez nous aussi la question des valeurs s’invite dans le débat présidentiel.