Hier, j’ai évoqué l’étrange projet de François Hollande d’intégrer la loi de séparation de l’Église et de l’État de 1905 dans la Constitution de la Cinquième République. Je continue à m’interroger sur le sens de cette initiative, dont la faisabilité me paraît nulle. Le candidat socialiste a-t-il vraiment réfléchi aux seules conséquences pratiques que les spécialistes ont désignées sur le champ, c’est à dire la fin du système dérogatoire de l’Alsace-Lorraine et de celui des territoires d’Outre-Mer par rapport au régime de stricte séparation ? Si oui, on serait en droit de s’inquiéter, car il s’agirait d’un durcissement idéologique qui compromettrait l’idée de laïcité avec ce qu’on appelle le laïcisme et qui consiste en une idéologie hostile à la religion.
Pourtant, la gauche elle-même est loin d’être unanime dans le rejet du système concordataire. Il y aurait lieu d’interroger sur le sujet les élus socialistes des départements concernés. Et puis j’ai un souvenir très précis d’une intervention de Jean-Pierre Chevènement à Strasbourg, lorsqu’il était ministre de l’Intérieur dans le gouvernement de Lionel Jospin. Chevènement est réputé pour son orthodoxie républicaine et il paraît difficile de contester son attachement à la neutralité de l’État. C’est pourtant lui qui déclarait à Strasbourg que la laïcité était une valeur et non pas un dogme. Et il affirmait de la façon la plus nette qu’il n’était pas question de revenir sur le régime concordataire : « Cette particularité, disait-il encore, est des plus honorable, elle mérite d’être respectée, elle sera respectée ».
Le même ministre de l’Intérieur avait conclu son discours par quelques réflexions sur l’islam et il se montrait ouvert à l’aménagement d’une place de cette religion nouvelle dans le cadre original du statut religieux de la région. Je n’ose croire qu’un nouvel extrémisme soit en train de s’affirmer pour mettre fin à un héritage historique précieux. Ce n’est pas en ouvrant un nouveau front de combat qu’on fera progresser l’unité morale du pays. La laïcité ne nous importe que parce qu’elle protège la liberté de conscience et la liberté de culte. Il serait périlleux de rompre un équilibre qui, jusqu’ici, n’était pas sérieusement contesté ou compromis.
Chronique lue sur Radio Notre-Dame le 25 janvier 2012.
Pour aller plus loin :
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- Édouard de Castelnau
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- INTRUSION DE LA THEORIE DU GENRE A L’ECOLE ET DANS LA SOCIETE