Ce n’est sans doute pas un SDF comme les autres, car lui a écrit un livre et réussi à s’en sortir, du moins, presque. A cause de son amour de la langue française, ce qui explique la sortie de cet essai singulier intitulé Petites douceurs acidulées. Il s’appelle Frédéric Dhuême, il a 39 ans et j’ai eu la surprise de le voir et de l’entendre l’autre soir sur le plateau de Thierry Ardisson entouré du ministre Laurent Wauquiez et de l’humoriste Nicolas Bedos. Tous les deux étaient extrêmement attentifs aux propos de leur interlocuteur. Il se trouve que je connais Frédéric depuis plusieurs années et que j’ai même assisté en direct à ses exercices d’écriture qu’il mène toujours avec un dictionnaire qu’il ne cesse de consulter. Il est rigoureux comme styliste et il pourrait sans doute en remontrer à un certain nombre de politiques qui multiplient les incorrections et parfois même les fautes caractérisées de syntaxe et d’orthographe. Un récent communiqué de l’Élysée battait de ce point de vue tous les records.
Mais le témoignage de Frédéric est aussi intéressant, voire poignant, par ce qu’il nous révèle de ce monde de la rue qu’il a bien connu, puisqu’il y a même vécu pendant 8 ans. Il parle de « cet immense hôpital psychiatrique à ciel ouvert », parce qu’il est celui de toutes les détresses, des maux du cœur et de l’âme qui s’ajoutent à la faim, au froid, à la violence. A l’origine de la condition des sans domicile fixe il y a la solitude. La fin de toutes ces solidarités élémentaires qui permettent la survie. La première d’entre elles étant celle de la famille. Frédéric a lutté contre cet abandon en fréquentant les bibliothèques, en achetant le journal du jour. Il devrait se présenter à Julien Lepers pour participer à l’émission Questions pour un champion. Il sait énormément de choses.
Mais il y a aussi le contact avec le prochain. Lorsqu’il faisait la manche dans la rue, ce qu’il appréciait le plus c’est que les gens lui parlent. C’était mieux que s’ils lui donnaient une pièce de monnaie. Je suis sûr que tu t’en sortiras, ami Frédéric. J’espère que ton combat aidera tous tes frères errants, parce que dans ta rage il y a la résistance de la dignité.
Chronique lue sur Radio Notre-Dame le 05 décembre 2011
Frédéric Dhuême avait publié il y a quelque temps une lettre ouverte sur notre site : Que Dieu protège les indigents