On apprenait hier que le programme d’aide alimentaire européen allait pouvoir fonctionner encore durant deux ans. L’Allemagne, qui est le principal contributeur financier de ce programme, a, en effet, accepté de transiger. Cela n’empêche pas qu’en 2014 le couperet tombera et que les associations humanitaires, qui bénéficiaient de l’aide européenne, vont devoir résoudre un énorme problème. Cette affaire donne le vertige. Dix-huit millions d’Européens souffrent aujourd’hui de la faim. Dix-huit millions de personnes n’ont pas la possibilité de se nourrir convenablement dans un continent pourtant privilégié par rapport à la plupart des régions du monde, y compris celles qui sont en pleine croissance économique.
L’équation est simple. Dans deux ans, le budget d’aide alimentaire de Bruxelles sera réduit des quatre cinquièmes, et les associations comme les restaurants du cœur sont aujourd’hui dans l’impossibilité de dire où elles trouveront l’équivalent de la manne européenne. Bien sûr, celle-ci a une histoire. A l’origine, il s’agissait d’écouler les surplus de la production agricole qui étaient considérables et qui trouvèrent ainsi leur débouché naturel. Mais il n’y a plus désormais de surplus agricoles, et on a suppléé grâce à des subventions. Mais six pays, dont l’Allemagne, ont décidé d’arrêter les frais. La nouvelle a provoqué étonnement et effroi chez nous. A Berlin et ailleurs, on estime que c’est aux États qu’il appartient de prendre en charge les populations défavorisées.
Le débat va probablement se poursuivre, mais il ne faut pas se faire d’illusions. C’est une époque qui s’achève, ce qui nous renvoie plus généralement à la crise où nous continuons à nous enfoncer. En France, se sont quatre millions de personnes qui bénéficient d’un soutien alimentaire. Il y a là un vrai scandale pour l’esprit. On ne peut s’empêcher de penser qu’il y a quelque chose de pourri dans notre beau royaume. Comment un pays aussi riche que le nôtre, dont l’agriculture constitue un atout considérable, peut-il laisser tant de gens sur la route ? Il y a des explications sans doute, mais qui ne sauraient répondre à l’ampleur du scandale.