SHAHBAZ BHATTI, QAMAR DAVID, martyrs chrétiens du Pakistan - France Catholique
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Funérailles catholiques : un temps de conversion
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SHAHBAZ BHATTI, QAMAR DAVID, martyrs chrétiens du Pakistan

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Shahbaz Bhatti (d.r.): “Je crois en Jésus Christ . . . et je le suis jusqu’à la Croix.”

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L’ADN du Pape Jean-Paul II, de Mère Teresa ou de saint François d’Assise n’avait rien de spécial. Leur humanité était la même que celle de n’importe qui d’autre. C’est ce qu’ils en ont fait qui les a rendus saints. Ceci pour nous rappeler que nous sommes tous de la pâte dont on fait les saints.
Notre monde singulier, fait d’avions s’entrecroisant, de gratte-ciel de verre, et obscurci par les plumets de la guerre, n’est pas agréable à regarder. Nos ordinateurs organisent proprement le chaos du monde et nous le restituent en informations apparemment croustillantes qui ne font pas la part du trivial et de l’héroïque : « L’occasion du jour : $ 50 de gâteaux à thé pour $ 5 ! » — « Shahbaz Bhatti, l’unique ministre chrétien du Pakistan, assassiné » — « Charlie Sheen : le Messie de Malibou » …

Notre approche du monde au­jour­d’hui, une série de « liens » à haut débit et d’encarts de couleur, nous cache le fait que nous vivons au cœur d’une bataille spirituelle et que de futurs saints se promènent au milieu de nous.
Shahbaz Bhatti était l’un d’entre eux. Voyez son portrait sur Google. Son visage étrangement bon et aimable contraste avec sa vie et son exemple rien moins que légers. Il était entré au gouvernement pakistanais en 2008 comme ministre des Minorités, le seul catholique voire le seul chrétien, et l’un des rares esprits ouverts d’un cabinet virant à l’extrémisme. Son programme était de défendre « l’opprimé, le déshérité et le marginalisé » et de lutter pour « l’égalité, la justice sociale, la liberté religieuse, et aider et renforcer les minorités religieuses ». Il disait qu’il voulait envoyer « un message d’espoir aux gens qui sont en proie à la déception, à la désillusion et au désespoir ».

Bhatti était devenu un opposant public des lois sur le blasphème qui rendent passible de la peine de mort tout auteur de propos jugé offensif à l’égard de l’Islam. Il prônait la liberté religieuse pour tous les Pakistanais quelle que soit leur foi, chrétiens, hindouistes ou musulmans. Il avait lancé une campagne nationale pour promouvoir l’harmonie interreligieuse, institué une ligne téléphonique ouverte 24 heures sur 24 pour recevoir les appels concernant des violences contre les minorités religieuses, proposé au ministère de l’Éducation un programme de religions comparées dans les écoles, ouvert dans les prisons des lieux de prière pour les non-musulmans, engagé un projet de protection des objets d’art et des sites religieux relevant d’autres fois, et cherché à convaincre le gouvernement de respecter les jours de fête et de repos propres aux minorités religieuses.

Il a été abattu par des extrémistes alors qu’il quittait la maison de sa mère pour se rendre à son bureau pour un nouveau jour de travail. Il avait commencé à recevoir des menaces de mort en 2009 lorsqu’il avait condamné les violences à l’encontre des chrétiens dans la province de Gojra. Elles s’étaient multipliées après qu’il eut refusé de se taire contre les lois sur le blasphème et leurs excès.

Il ne s’agit pas en l’occurrence simplement d’une nouvelle forme moderne de croisade. Bien plus, bien davantage, car nous sommes de la pâte dont on fait les saints, nous envions les saints – pour les exemples vivants de ce que nous pouvons devenir. Quand quelqu’un d’entre nous a subi le martyre, nous nous devons de reconnaître sa sainteté.

Nous envions les saints de la même manière dont nous désirons les sacrements. Nous avons besoin de voir et de goûter comme est bon le Seigneur. Dieu n’a pas besoin qu’on lui clame notre foi ou de gravir les marches. Nous sommes ceux qui en avons besoin. Nous avons besoin d’entendre les paroles de l’absolution. Nous sommes des gens dotés de sensations physiques et nous avons besoin de la Bonne nouvelle physique et sensorielle que le Christ nous a libérés du péché.

De la même façon, nous avons besoin des exemples de gens qui ont vécu des vies dignes d’admiration. Nous avons besoin de voir le courage pour le Christ à l’œuvre dans un monde qui préfère ne rien remarquer ; qu’un homme de conviction, élevé dans une famille de la classe moyenne à Lahore, avec quatre frères et une sœur, peut devenir un saint.
La canonisation commence souvent par l’acclamation populaire, avant même une proclamation pontificale officielle. Le peuple a vénéré saint François d’Assise immédiatement à sa mort ; la proclamation pontificale a suivi juste deux ans plus tard. L’Église a mis en place à juste titre des procédures pour une canonisation officielle, mais l’appel du peuple compte toujours. Lors des obsèques du Pape Jean-Paul II, la foule a crié « santo subito ! » (saint tout de suite). Le Pape Benoît XVI a mis en œuvre le processus de béatification immédiatement sans attendre le délai normal de cinq ans.

Il y a déjà eu des appels en fa­­veur de la béatification de Bhatti. Les évêques du Pakistan envisagent de demander au Vatican de déclarer Bhatti martyr. Le 4 mars, les catholiques locaux ont observé une journée de jeûne et de prière et ont organisé un pèlerinage au diocèse de Faisalabad dont Bhatti était originaire pour vénérer son œuvre. Une déclaration pontificale de martyre rendrait inutile la condition du miracle nécessaire pour béatifier Bhatti (un miracle serait toujours requis en cas de canonisation).
L’appel à la béatification et à la sainteté en faveur de Bhatti pourrait bientôt devenir universel. Je ne l’ai pas connu. Mais mes collègues de la Fondation Becket pour la liberté religieuse le connaissaient. L’un d’entre eux se souvient l’avoir entendu exprimer sa disponibilité à mourir pour la cause de la liberté religieuse pour tous.

Dans une vidéo enregistrée peu avant sa mort, Bhatti répondait aux menaces de mort dont il était l’objet : « Je veux partager avec vous ma foi en Jésus-Christ, qui a donné sa vie pour nous. Je connais le sens du mot “croix“ et je le suis jusqu’à la croix ».
Bhatti a suivi la croix jusqu’à sa mort, et il est devenu ainsi plus qu’un héros pakistanais. Son message est universel. Ses paroles sont pour tout homme, partout, et toujours.

Il peut paraître étrange d’entendre les paroles d’un martyr, prononcées calmement sur YouTube. Mais nous sommes tous de la pâte dont on fait les saints. Les saints d’aujourd’hui et de demain sont au milieu de nous dans la vie quotidienne. Maintenant c’est le tour de Shahbaz Bhatti d’être présenté à l’Église comme candidat à la reconnaissance officielle de martyr et saint.
L’Église catholique ne dispose pas d’un saint patron de la liberté religieuse (Dignitatis Humanae n’a à vrai dire que quarante-cinq ans d’âge). Le Pape Jean-Paul II est un choix idéal. Mais il est candidat de tant d’autres causes, depuis la théologie du corps jusqu’au ski. Mon intuition personnelle est que le 2 mars marquera un jour la fête de Shahbaz Bhatti, martyr et saint patron de la liberté religieuse.


Karachi (Agence Fides) – La mort de Qamar David est de celles qui posent de nombreuses questions. Chrétien pakistanais injustement accusé de blasphème, il était incarcéré depuis 2006. David a été trouvé mort le 15 mars par les gardiens de prison qui, dans la première version des faits, ont parlé de « crise cardiaque ». Le cadavre de l’homme a été transporté à l’hôpital civil de Karachi où a été certifié le décès. David purgeait une peine de réclusion à perpétuité pour blasphème. Il était accusé d’avoir envoyé des messages texto au moyen de son téléphone portable dont le contenu aurait été offensant pour l’islam et le prophète Mahomet.

Les groupes chrétiens annoncent une journée de deuil mais demandent par ailleurs une enquête plus approfondie sur les causes de la mort. Il semble en effet que l’homme ait souvent été l’objet de mauvais traitements de la part des gardiens de la prison. La famille de David s’est rendue à Karachi pour se faire remettre le corps. La Masihi Foundation, organisation qui s’occupe du cas d’Asia Bibi, la jeune femme chrétienne condamnée à mort pour blasphème, a exprimé « un profond trouble et une vive préoccupation après cet événement ». « C’est un autre jour terrible pour les chrétiens au Pakistan. Nous ne nous sommes pas encore repris après la mort du ministre Bhatti et cette mort fait croître nos craintes quant à l’avenir des chrétiens aux Pakistan. David était victime de fausses accusations. Maintenant, nous craignons fortement pour la vie d’Asia Bibi qui se trouve dans les mêmes conditions que David : dans une cellule où tout pourrait arriver. Après cet événement, nous demandons aux autorités de protéger sa vie et nous réitérons notre appel en faveur de l’abolition de la loi sur le blasphème. »

P.A.