Un appel signé par près de 150 théologiens germanophones vient d’être publié et suscite jusque chez nous un certain écho. On sait combien le catholicisme allemand a été particulièrement touché par la révélation publique des crimes sexuels contre l’enfance et l’adolescence commis par des prêtres et des religieux. L’opinion publique ne pouvait pas ne pas être bouleversée et les catholiques eux-mêmes secoués par une grave crise de confiance. On conçoit dans ces conditions que certains veuillent réagir en proposant des réformes dans l’Église. Et les théologiens, de par leur aptitude à la réflexion approfondie et éclairée, ne peuvent manquer d’intervenir au service de la communion des croyants et au secours des esprits désemparés. Cependant, force nous est de constater que l’initiative de cette mouvance germanophone se signale surtout par une rare carence de discernement et par une démagogie que l’on pourrait qualifier, au sens négatif, de soixante-huitarde, accusant ainsi une étonnante régression.
Comme il est d’usage dans ce genre littéraire, on retrouve les habituelles revendications en faveur du mariage des prêtres, de l’ordination des femmes et même la justification de l’homosexualité. Ce prétendu avant-gardisme se signale surtout par son conformisme et sa méconnaissance des réalités. Les solutions envisagées, lorsqu’elles sont appliquées sur le terrain — comme c’est le cas dans l’anglicanisme — loin de résoudre les problèmes, ne font que les aggraver en y ajoutant d’autres difficultés. Le résultat c’est l’amplification de la dispersion des fidèles et la désintégration des institutions.
Cela rappelle des souvenirs… Dès 1968, le Père de Lubac et quelques grands théologiens avaient réagi avec vigueur à une initiative du même ordre. Ils avaient souligné le danger majeur d’une dissociation entre le magistère et les théologiens. C’est malheureusement toujours le cas aujourd’hui. Il n’y aura pas de renouveau sans un ancrage commun dans la foi et une unité de témoignage. Sans compter que les grands réformateurs ont toujours été des saints dont l’audace n’avait rien à voir avec le tiède compromis du siècle.