Les leçons de Howard Stern - France Catholique
Edit Template
Marie dans le plan de Dieu
Edit Template

Les leçons de Howard Stern

Copier le lien

Voici cinq ans, le 16 décembre, c’était le dernier jour à la radio de Howard Stern. N’y a-t-il pas trop de silence maintenant ? Avant son départ il ne se passait guère de jours sans qu’on ne l’entende vociférer ses commentaires sur l’actualité. Résonnant parfois dans le pays entier.

Pour ceux qui, Dieu merci, ne s’en souviennent pas, Howard Stern n’était certes pas le premier à pratiquer la culture du scandale à la radio mais il a perfectionné l’art de diffuser la vulgarité. Un de ses premiers « coups », lors de l’accident d’avion d’Air Florida dans le Potomac : le lendemain, il appelait Air Florida au téléphone pour connaître le prix du billet d’avion de l’Aéroport National (au bord du Potomac à Washington, N.d.T.) au pont de la 14ème rue, là où s’était abîmé l’avion. Licencié, il fila de Washigton à New York.

Les Newyorkais de l’époque ont gardé le souvenir vivace de l’impact de Stern. Les radios de toutes les voitures dans New York étaient branchées sur son émission matinale. L’écouter était devenu l’habitude au goût de péché véniel de centaines de milliers de Newyorkais. Ceux qui n’écoutaient pas Stern en ont certainement eu des échos par la presse d’actualité ou dans les pages dédiées aux media. Certes, ses excès de langage étaient amusants, mais on ne pouvait guère les supporter plus d’une demi-heure. La vulgarité de ses propos semblait, à l’époque, naturelle à New-York. Mais, quand une station radiophonique de Philadelphie se mit à diffuser son émission en 1986, la Commission Fédérale des Communications enregistra en trois mois plus de plaintes qu’elle n’en avait reçu à New-York au cours des trois années précédentes.

Malgré l’afflux de réclamations, Stern alla de plus en plus fort. Il accrut son audience et finalement couvrit entièrement le pays. Il s’essaya à la télévision. Il écrivit des livres. Il s’octroya le titre de « roi de tous les médias ». Mais tout reposait sur l’assaut perpétuel mené contre les sentiments de l’Amérique profonde, sur sa capacité à heurter la bourgeoisie et empoisonner les autorités de régulation des émissions.

Son appel à Air Florida et la dérision pour parler d’un accident d’aviation n’attirèrent pas sur Stern les foudres de la Commission Fédérale des Communications. Cette blague puérile et idiote était encore tolérable à l’antenne. Stern eut des ennuis en parlant de sexe. En 1986 une mère à Philadelphie porta plainte quand son fils entendit une émission de Stern parlant de poitrine, de dimension du pénis, de copulation, de zoophilie. Stern raconta avoir reçu un appel d’un auditeur « sodomisé par la marionnette Lamb Chop » et fit des blagues sur des exploits sexuels avec « Tante Jemima ». Après la fusillade du lycée Columbine en 1999 Stern s’étonna que les tireurs n’aient pas au préalable violé les femmes qu’ils assassinaient.

Au début, la Commission Fédérale des Communications s’avoua désarmée. En 1985 elle déclara « notre pouvoir de supervision des programmes est …. très limité … le Premier Amendement (de la Constitution des États-Unis. N.d.T.) protège les droits des stations radio d’émettre des déclarations potentiellement choquantes, et une société de liberté attend la tolérance des autorités en la matière. » Cependant, suite à la plainte portée à Philadelphie, la Commission opta pour la sévérité et commença à appliquer des règles tombées en quasi-désuétude. Par un vote unanime les commissaires établirent que Stern « traitait de sexualité et de scatologie d’une manière particulièrement choquante. » La Commission étendit la définition du mot « obscène » « au langage et aux accessoires qui dépeignent ou décrivent, en termes particulièrement choquants, selon les usages contemporains dans le monde audio-visuel, l’activité ou les organes sexuels ou de la défécation. » La réponse de Stern fut une grande manifestation à New-York, tirant un pied de nez à la Commission Fédérale des Communications.

Les amendes commencèrent à pleuvoir en 1990. Six mille dollars infligés à la Société Infinity Broadcasting, 105 000 dollars en 1992 à la Société Great Media, puis deux amendes d’un montant total de 1,1 million de dollars en 1992 – 1993 à Infinity Broadcasting. En 2004 les stations de radiodiffusion ou les sociétés diffusant l’émission de Stern se firent infliger une amende de deux millions et demi de dollars, la plus lourde jamais infligée à une émission.

En 2005, Stern annonça qu’il abandonnait la radio traditionnelle au profit de la transmission par satellite par « Sirius Satellite » pour un traitement annuel de 100 millions de dollars, avec un contrat de cinq ans. Bien sûr, ça a fait le tour de toutes les stations radio nationales. Howard en a fait un « fromage », car il se pensait bienvenu sur le nouveau système de diffusion, étant à l’abri de la censure. En réalité, on n’en a plus entendu parler. Une grande histoire à l’âge de la communication électronique.

Bien sûr, vous pourrez le trouver dans son ghetto doré de Sirius, sachant qu’il ne touchera qu’une vingtaine de millions d’abonnés auditeurs. Et son audience personnelle n’est qu’une minuscule partie de l’audience totale. Voilà pourquoi plus personne n’y fait attention. Il n’existe plus dans l’imaginaire du public. Il a pratiquement disparu de la presse écrite. Son nouveau contrat a été annoncé hier dans les journaux, dont un entrefilet en bas de troisième page de la section « affaires » d’un quotidien. En tout état de cause, Stern a disparu de notre culture.

La mésaventure de Stern ressemble à celle du théologien dissident Charles Curran. Curran s’est fait éjecter de l’Université Catholique Americaine, privé du titre de théologien catholique. Il a fui vers une université Méthodiste, et maintenant nul ne lui prête attention, si ce n’est les survivants du Catholicisme d’extrême gauche.

Stern a induit la renaissance d’une saine notion de service public, rejetant l’ordure dans son coin. Un vœu ? Le tout-porno quitte votre fournisseur d’accès internet, sort des catalogues de télévision par câble, disparaît de tous les moyens de grande diffusion. Il est relégué dans les quartiers chauds d’où il ne pourra se répandre. Ceci n’exclut pas la chasse à l’obscénité, qui doit s’adapter à la menace permanente sur le web. Mais les ordures doivent disparaître, tout comme a disparu Howard Stern.


Source : http://www.thecatholicthing.org

Traduit en français par Pierre Lebègue


Austin Ruse est Président de l’Institut Catholique des Droits de la Famille et de l’Humanité (C-FAM) siégeant à New York et à Washington, un institut de recherche exclusivement consacré à la politique sociale internationale. Les opinions exprimées sont propres à Monsieur Ruse et ne reflètent pas nécessairement la politique ou les positions de C-FAM.