On les appelle à toute heure auprès des malades, ou des mourants, à leur domicile. Depuis 150 ans, leur présence, gratuite, est consolation, parce que leur cœur, formé à l’école de la prière avec saint Dominique, à l’intime union avec le Christ, est habité par le Consolateur, Dieu lui-même qu’elles portent partout avec elles, au chevet de la souffrance humaine, pour faire jaillir l’amour.
Si vous les cherchez sur Internet vous les trouvez sur le site de leur diocèse mais aussi dans d’autres annuaires sous le titre : « Œuvres des Dominicaines » , avec pour « secteur d’activité » : « Santé et action sociale » , « Aide à domicile », « Service à la personne ». Un secteur en pleine expansion. à la pointe de l’actualité sociale. Cent cinquante ans plus tard, l’intuition première demeure d’actualité.
« C’est Dieu lui-même qui a eu l’initiative, dans le cœur de l’Abbé Borge – aumônier à l’Hôtel-Dieu – et de Marie Thérèse Farré – « Mère Térèse », tous deux tertiaires dominicains », explique Mère Jean Marie, prieure générale.
Telle est la vitalité du charisme de compassion de saint Dominique incarné en cette petite communauté dont la Prieure générale précise : « Mère Térèse nous invite ardemment, et nous entraîne, à la suite de saint Dominique, à livrer notre vie au Christ, pour l’annoncer tout proche à ceux qui souffrent, à ceux qui vont mourir. »
Ce jubilé, explique Mère Jean Marie, c’est « l’heure de rendre grâce, avec toute l’Église, pour la joie de l’homme, pour la joie de Dieu ! ». Et cela se voit, la joie que Dieu met au cœur des sœurs. Elle éclate dans le sourire de la Mère prieure, sr Marie Pierre, joie de l’Église du Sénégal qui fleurit à Bourg.
L’évêque de Belley-Ars, Mgr Guy-Marie Bagnard a ouvert, le 20 juin à la cathédrale Notre-Dame – Mère Térèse était paroissienne de Notre-Dame – la célébration de ce jubilé, sous le patronage du Cœur Immaculé de Marie, avec un décalage de date dû à la conclusion de l’Année sacerdotale, sous la protection du saint Curé d’Ars. Il a souligné combien loin d’être « perdues dans l’oraison », les sœurs nourries par l’Eucharistie où elles puisent leurs forces quotidiennes, sont « bien ancrées dans la terre des hommes ». Et il les a invitées « à la suite de leur fondatrice, à ne jamais cesser de progresser sur la voie de l’Amour ».
Leur charisme se met « en quatre » (le nombre des sœurs à l’origine): une tradition mendiante, à la suite de saint Dominique, pour vivre dans un abandon total à Dieu, et « vivre de Dieu » par une vie contemplative ; en communauté fraternelle, fondée sur le pardon mutuel ; comme saint Dominique, à la recherche de la vérité ; pour aimer Dieu et le prochain jusqu’à l’extrême. La pauvreté pour point d’appui, Mère Térèse a montré, en la parcourant, cette route de la foi jusqu’au bout de la confiance ; elle écrivait, en novembre 1893, après la mort d’une jeune sœur : « Nous voilà encore diminuées de nombre, que le Bon Dieu soit béni. C’est sa manière à Lui de répondre à nos supplications d’accroissement […]. Appliquons-nous à mériter d’être les troupes de Dieu. Si petite soit cette troupe, la victoire couronnera ses efforts. Qui a Dieu a tout. »
Le dimanche 8 août, en la fête de saint Dominique, la Messe présidée par la Père Gilles-Hervé Masson, un frère en saint Dominique, rassemblait des amis venus nombreux, rendre grâce à Dieu avec la communauté, et les amis prêtres concélébrants : les Pères Pascal et Matthieu, de la communauté Saint-Jean, Philippe Seys, de la communauté Saint-Martin, frère de l’une des sœurs, et le P. Radek, prêtre polonais, ami de la communauté.
Mère Jean Marie a eu à coeur d’affirmer la paternité de saint Dominique, reçue de Mère Térèse – ainsi des œuvres de Dieu : « Il y a 150 ans – 1860 – Mère Térèse nous donnait Saint Dominique pour Père et pour modèle. Nous nous rappelons : au moment d’être admise dans le Tiers-Ordre de saint Dominique, le 8 décembre 1856, Marie-Thérèse lit un événement de la vie de saint Dominique : la nuit qu’il passe, en dialogue avec l’aubergiste – cathare – de Toulouse, et la conversion de cet homme à la foi chrétienne au petit matin. Elle reçoit là une lumière décisive : « Beaucoup auraient besoin de recevoir de semblables visites, il faut les aller trouver dans leur maison […], par les soins, soulager le corps – gratuitement. […] Mais les prêtres ne peuvent pas toujours remplir facilement cette mission. Il doit être possible d’y suppléer par le soin des malades à domicile ; par ce service corporel, on pourrait procurer le bien des âmes. »
Et l’action de grâces du peuple de Dieu présent — toutes générations, tous états de vie — a retenti, unanime, dans la chapelle, restaurée en 2005, grâce à un don insigne ; et grâce à la sensibilité d’un ami architecte pour qui la spiritualité se fait formes et couleurs, expression matérielle de la grande douceur qui émane de cette communauté de sœurs, qu’il côtoie de près.
La fête ensoleillée s’est prolongée, familiale, par un verre de l’amitié, et un déjeuner tiré du sac dans le jardin des sœurs.
Cette célébration de la mémoire de l’origine a connu comme un instant — un sommet — de grande paix, l’après-midi grâce à l’évocation, par Marie-Claude Vandembeusche, historienne, amie de la communauté, de la présence des dominicains à Bourg pendant 350 ans, de 1414 à la Révolution. Puis lorsque le Père Masson a évoqué saint Dominique « notre Père », jusqu’à le faire découvrir — tant il est caché dans sa discrétion — en sa tendresse et son humanité : Saint Dominique saisi par Dieu, livré au Christ et à ses frères les hommes, tout proche de nous aujourd’hui : « Il donnait le jour au prochain et la nuit à Dieu. »
En 1856, Marie-Thérèse, confirmée par Mgr de Langalerie, évêque de Belley, abandonne son métier de couturière ; le 25 septembre 1860, l’évêque bénit la petite communauté naissante, 12, rue Lalande à Bourg. Il nomme Marie-Thérèse Farré – Mère Thérèse – supérieure. La congrégation est placée sous la protection du Cœur Très Saint et Immaculé de Marie… Rendez-vous samedi 25 septembre prochain, pour célébrer à la date même, cette douce, et nouvelle, « irruption » de Dieu parmi les hommes : n’a-t-Il pas hâte de nous révéler, pour nous le communiquer à chacun, son Amour de Père ?
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Un amour de Mère : c’est le titre du DVD de Marc Jeanson qui a saisi quarante minutes de la vie quotidienne de ces contemplatives dans l’action. On les voit s’envoler les unes après les autres comme des hirondelles, aux quatre coins de la ville, pour « soigner les corps pour mieux soigner les âmes », et leur ouvrir « un avenir et une espérance ».
Prix : 25 euros franco. À commander à DCX, 31, rue Rennequin 75017 Paris, Tél : 01 42 67 30 37.