Parler des zones humides suscite toujours l’étonnement voire l’amusement, certains pensant davantage aux couches-culottes qu’à toute autre considération scientifique. Grave erreur, car les zones humides sont une chose sérieuse. Pour preuve, l’Organisation des Nations-Unies leur consacre chaque année une journée mondiale fixée au 2 février en souvenir de la signature, le 2 février 1971, à Ramsar en Iran, de la Convention des zones humides d’importance internationale.
Si pour nous, Européens, les zones humides évoquent en priorité les marais, les tourbières ou autres plaines inondées, ailleurs, on pensera plutôt aux lagunes ou aux mangroves. De fait, les zones humides, au carrefour de la terre et de l’eau, présentent de multiples facettes, ayant en commun une diversité biologique exceptionnelle qui ne pouvait pas manquer d’être soulignée en cette année justement consacrée à la biodiversité. En outre, par leurs différentes fonctions, les zones humides jouent un rôle primordial dans la régulation de la ressource en eau, l’épuration, le soutien d’étiage et la prévention des crues.
Mais les zones humides sont aussi des milieux menacés. Au cours du siècle dernier, la moitié d’entre elles a été détruite et aujourd’hui encore, elles restent soumises à l’épreuve de l’urbanisation, de l’intensification de l’agriculture et des multiples pollutions. On se souvient, en particulier, que le Marais poitevin a perdu son label de parc naturel régional à la suite de l’assèchement d’une partie du marais consécutive à une agriculture intensive du maïs, grosse consommatrice d’eau.
Pourtant, en signant la Convention de Ramsar, la France s’est engagée à préserver les zones humides sur son territoire. Une réglementation a été mise en place concernant aussi bien l’aménagement du territoire que la gestion de l’eau en passant par le contrôle des activités économiques à laquelle sont venus s’ajouter des programmes d’aides à la préservation et à la restauration des milieux. Il convenait donc d’aller plus loin et c’est pourquoi Chantal Jouanno a choisi le 1er février dernier (en avance d’une journée donc) pour annoncer le lancement du nouveau plan national d’action pour la sauvegarde des zones humides.
L’annonce a été faite en plein cœur du site Ramsar des basses vallées angevines en présence de nombreux représentants du groupe national des zones humides, d’acteurs locaux sur qui reposent la protection au quotidien de ces espaces et de Mme Alexia Dufour, représentant le secrétariat de la Convention de Ramsar. Ce plan fait suite au Grenelle de l’environnement et prend toute sa place au sein de l’Année internationale de la biodiversité. Il a pour ambition de favoriser les bonnes pratiques et de développer des outils efficaces pour une saine gestion des zones (avec en particulier la mise en place de manuels d’aide et de sessions de formation) dans le respect des engagements internationaux de la France.
Pour y parvenir, le plan comporte 29 actions réparties en 4 axes relatifs respectivement à la mobilisation et à l’harmonisation des politiques publiques en milieu agricole et urbain pour une meilleure gestion des zones humides, un renforcement des connaissances de ces zones, une meilleure formation des acteurs et une plus grande sensibilisation du public et enfin une valorisation des zones humides françaises au niveau international.
Du parc du Marquenterre en Picardie aux Tre Padule de Suartone en Corse en passant par la Grande Brière ou les Dombes, la France possède en effet un grand nombre de zones humides exceptionnelles qui constituent également un atout touristique de premier plan, qui vaut aussi pour nos collectivités d’outre-mer. S’il faut donc parler sérieusement des zones humides, que cela ne vous empêche pas néanmoins de fredonner, surtout en ces lendemains de Saint-Valentin, l’inoubliable duo de Pauline Carton et René Koval : « Ah, rien ne vaut pour s’aimer les grands palétuviers ! »
Fabrice de CHANCEUIL
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