L’euthanasie ? Ses promoteurs font du bruit. Mais l’action inlassable des personnes engagées dans les soins palliatifs est discrète. Ils savent, comme Roselyne Bachelot, ministre de la Santé l’a souligné que « la dignité ne décline pas avec nos forces », une conviction que le docteur Gomas résume en affirmant : « Le dignitomètre n’existe pas ».
Ces formules, Jean Leonetti les a citées jeudi 26 novembre lors de la fête des 25 ans de la toute première association française de soins palliatifs, l’ASP fondatrice. Dans l’amphithéâtre de l’école du Val-de-Grâce à Paris, le député, qui vient de gagner une bataille parlementaire, conteste l’idéologie de la mort prétendument digne. L’auteur de la loi de fin de vie cite aussi Jean-Paul Sartre : « On n’a jamais honte tout seul. » Une façon de rappeler que c’est dans le regard des proches ou des soignants, qu’une personne malade a besoin de voir qu’elle reste digne, digne d’être soignée et d’être aimée. Et Jean Leonetti d’écarter l’acharnement thérapeutique et l’euthanasie comme « deux actes d’incompétence médicale ». Le président de l’ASP fondatrice, Alain Monnier, regrette également que le mouvement des soins palliatifs soit « confronté depuis plusieurs années à un courant d’opinion pro-euthanasie relayé par les médias ». Il note le risque que des considérations économiques fassent passer d’un prétendu « droit à mourir » au « devoir de mourir ». L’association, qui est non-confessionnelle, reconnaît dans l’interdit du meurtre un principe de base de la vie en société.
Tous les intervenants à l’anniversaire de l’ASP fondatrice ont montré que la démarche palliative, qu’elle intervienne dans les épisodes aigus d’une maladie encore curable ou en fin de vie, est résolument « moderne », et même, plus qu’on ne le croit, « technique ». Coordonnateur du programme national de développement des soins palliatifs, le docteur Régis Aubry abonde en ce sens en annonçant le renforcement universitaire de la discipline. Les soignants devraient tous être sensibilisés et formés, à la culture palliative. Son développement est vital.
Pour cela, dans une société où l’isolement grandit, la place des bénévoles en soins palliatifs est essentielle. L’ASP fondatrice, association de volontaires, a aujourd’hui du mal à renouveler ses équipes. Elle agit à domicile ou à l’hôpital. Ceux qui y participent ont été « recrutés » avec un discernement solide car on ne s’improvise pas bénévole en soin palliatifs. Ils sont formés, encadrés, et supervisés. Tout un chemin pour, finalement, se rendre présent à l’autre, en toute simplicité. Le témoignage des bénévoles qui ont accompagné des personnes jusqu’au terme de leur vie le montre : ces rencontres sont des instants précieux. Parfois extraordinaires, au point qu’on peut se demander qui accompagne qui. Écouter, sans faire intrusion. Accueillir avec un infini respect, sans se projeter, des confidences tour à tour douloureuses et joyeuses. C’est assurément une école de vie. On en ressort moins agité par les soubresauts d’une actualité superficielle. Chez les volontaires, le désir de mieux écouter ses enfants, son conjoint ou ses proches, grandit. On croyait devoir « donner » une demi-journée par semaine, quitte à organiser autrement sa vie professionnelle. Et on découvre que ce temps est rendu, au centuple. Dans la famille des soins palliatifs où règne une délicatesse de cœur indicible on a coutume de dire : « Il reste tant de choses à faire quand il n’y a plus rien à faire ».
Pourquoi ne pas se poser la question d’un engagement bénévole dans une association de soins palliatifs ? L’ASP fondatrice compte, à Paris et en région parisienne 33 équipes et 240 accompagnants bénévoles. Pour répondre aux demandes des services hospitaliers et des réseaux de soins à domicile et permettre le renouvellement de ses équipes, elle a besoin de recruter plus de 80 accompagnants bénévoles chaque année. Discerner n’engage à rien, mais il y a beaucoup à gagner.