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La béatification de Jean-Paul II a franchi une étape décisive, avec l’approbation par une commission de cardinaux et d’évêques, de la relation qui établit l’héroïcité des vertus de Karol Wojtyla. D’évidence, les choses doivent se dérouler dans l’ordre prévu des procédures habituelles de la Congrégation pour la cause des saints. Même si, avec l’extraordinaire personnalité du pape venu de Cracovie, il y a quelque chose d’exceptionnel, même à l’intérieur du processus habituel.
Il y eut d’abord la vox populi qui le jour des obsèques, place Saint-Pierre, proclamait le désormais célèbre Santo subito. Il y avait d’ailleurs le célébrant principal de la cérémonie, le cardinal Joseph Ratzinger lui-même qui avait, lors de son homélie, placé délibérément Jean-Paul II en haut du ciel. On ne pouvait donc s’étonner du fait que Benoit XVI, dès le 28 juin 2005, décidât de l’ouverture du procès de béatification, préférant ne pas attendre le délai de cinq ans, qui s’impose d’ordinaire en telle matière. Un délai qui avait été aussi abrégé pour Sœur Térésa.
Tout a toujours été exceptionnel, je le répète, avec Karol Wojtyla. Il fait partie de ceux qu’on peut appeler les prédestinés, ceux qui, dans le plan de Dieu, ont été choisis pour mener un dessein qui entre totalement dans les voies de la Providence. Il est avant même son élection au siège de Pierre un héros de l’histoire. Mais l’héroïcité, en matière de sainteté, nous introduit à un ordre supérieur au sens de Pascal, celui de la charité.
On ne comprendra rien en effet, à cette reconnaissance particulière de l’Eglise si on en reste à la dimension d’une sorte de héros du rêve américain. Jean-Paul II a déjà été canonisé en ce sens par l’opinion publique. N’a t-on pas parlé de « pape superstar »? Il s’agit ici de tout autre chose. J’ai déjà cité plusieurs fois le mot de Bernanos, repris par Jean-Paul II, en introduction à son voyage à Lyon en 1986 :« Les Saints ont le génie de l’amour. » Et s’ils ont ce génie-là c’est en raison d’une relation spéciale au mystère de Dieu, charité qui les a investis. C’est le cas de Jean-Paul II depuis l’enfance. Dès son enfance le petit Karol avait appris de son père l’intimité de la prière, intimité qui ne l’a jamais quitté et qui explique tout de Vadovice à Rome. Nous avons tous été frappés, voire bouleversés, les uns et les autres lorsque nous l’avons approché, par sa capacité à se retrancher dans l’abîme de la contemplation, notamment devant le Saint-Sacrement. Un bloc de prière disait André Frossard, et aussi bien sûr une foi qui soulève les montagnes.
Nous sommes, Français, très touchés par le fait que le miracle examiné pour authentifier la béatification concerne Marie Simon Pierre des Petites sœurs des maternités catholiques. Ce miracle s’inscrit aussi dans le souvenir d’un homme connu comme thaumaturge durant son pontificat, dispensateur des dons de Dieu. S’il est béatifié place Saint-Pierre à l’automne prochain, je suis à peu près persuadé d’être présent à côté de mon ami Bernard Lecomte qui sera ému jusqu’aux larmes à l’unisson de tout le peuple polonais et de tout le peuple chrétien.
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