Un autre hommage à Pierre Chaunu - France Catholique
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Le martyre des carmélites
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Un autre hommage à Pierre Chaunu

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Écouter l’éditorial : Vladimir Fedorovski, Romancier, historien et essayiste, ancien diplomate soviétique, auteur de « Le roman de l’âme slave » (Editions du Rocher), était reçu ce jeudi matin à Radio Notre-Dame.
— – Vladimir Federovski, me permettra d’évoquer ce matin, la mémoire d’un maître dans cette discipline à laquelle il a voué une grande partie de sa propre vie, l’Histoire. On sait que Pierre Chaunu nous a quitté la semaine dernière, et que la dette que nous avons contracté à son égard est considérable. Impossible de résumer en quelques mots une œuvre immense, originale, et dont le propre était de toujours rapporter le passé à notre présent et à notre avenir possible. Rentrer en histoire avec Pierre Chaunu, c’était, pour reprendre l’expression de Philippe Ariès, devenir les archéologues de notre propre identité généalogique, économique culturelle, religieuse. Curieusement pourtant, à la base du travail de notre historien, le point de vue quantitatif devint prioritaire. Le chercheur s’intéresse à ce qu’il appelle les séries, les continuités chiffrées. Et cela ne le mène nullement à l’abstraction, encore moins à on ne sait quel matérialisme historique sur le modèle marxiste. Bien au contraire, l’histoire dite quantitative ou sérielle – il préférait ce mot – débouche sur la connaissance la plus concrète, la plus profonde et même la plus intime de notre humanité. Ce n’est pas pour rien que notre jeune historien s’est reconnu dans l’école dite des Annales et qu’il s’est placé sous le sillage de ce maitre éminent qu’était Fernand Braudel. Ce à quoi il aspire, c’est à la compréhension des phénomènes de fond, ce qui se rapporte au développement des sociétés avec leur système dé réciprocité de service, leurs attitudes face au défi de l’existence. Dans une telle perspective, il n’y a plus d’inconnus, d’anonymes qui seraient laissés dans l’ombre au profit des grands conquérants et des héros. Les plus humbles acteurs du passé revivent depuis les origines, puisque le temps long est préféré aux séquences courtes, et c’est l’ensemble du tableau qui se révèle, avec ses bases économiques bien sûr, mais aussi ses données culturelles, avec les facteurs de transmissions du savoir ; l’évolution des attitudes devant la vie qui mettent en avant l’importance de la démographie ; l’évolution des structures familiales et encore le facteur religieux avec les séries qui nous renseignent sur les pratiques cultuelles. Au terme, on s’aperçoit que l’on a devant soi le tableau tout entier. C’est l’homme même qui s’offre à nous avec tous ses repères quant à la vie, l’amour et la mort. Je suis obligé évidement d’aller à tout vitesse là où il faudrait longuement s’attarder. Mais je ne puis terminer ce bref hommage sans saluer le chrétien engagé, l’homme de foi et d’espérance, mais aussi d’ardente charité qu’était Pierre Chaunu. Son caractère passionné conférait à ses cours à l’Université quelque chose de prophétique. Si les étudiants accouraient pour l’écouter à Caen, en Normandie, puis à la Sorbonne, c’est qu’ils étaient subjugués par un maître du savoir mais aussi par un chrétien qui jamais ne cachait, bien au contraire, ses convictions. La leçon du savoir se mue en interrogation existentielle. Elle soulève toutes les grandes questions. Les réponses que la tradition chrétienne possède, proclame Pierre Chaunu, sont aussi actuelles ou aussi inactuelles aujourd’hui, qu’hier ou demain. Elles se situent hors du temps. Aujourd’hui comme hier les hommes ressentent plus ou moins sûrement, dit-il, que Quelqu’un les attend. Écouter l’éditorial :

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