En avril 2009, à l’occasion du pèlerinage à Rome avec les organisateurs du Festival Anuncio, nous avons pu rencontrer le cardinal Rylko, président du Conseil Pontifical pour les Laïcs. Au cours de cette audience, nous lui avons posé cette question : « Pensez-vous que l’annonce explicite de la Bonne Nouvelle aux non-croyants soit une expérience fondatrice dans la vie spirituelle d’un jeune catholique aujourd’hui ? » Sa réponse a été sans équivoque : « Oui, tout à fait ! »
Au cours de cette année, j’ai eu l’occasion de me déplacer dans plusieurs villes de France afin de présenter le projet Anuncio. Peu à peu, j’ai pris la mesure de cette réponse du cardinal. À chaque rencontre, je trouvais des jeunes motivés et engagés dans leur foi. Des jeunes qui vivent des sacrements, prient, s’investissent dans l’organisation de pèlerinages, week-ends de prière… Des jeunes qui aiment le Christ et son Église. Et pourtant, ce sont des jeunes qui craignent de sortir dans la rue annoncer que Dieu est amour ou alors qui n’en perçoivent pas l’urgence.
Et si la mission dans la rue était la nouvelle étape pour la croissance de notre Église de France ? Il y a d’abord eu le retour de messes toujours plus belles et priantes. Puis l’adoration eucharistique et la redécouverte du sacrement de Réconciliation. L’attrait pour les grands événements catholiques comme les JMJ, les visites du Pape et la renaissance des grands lieux de pèlerinage. Et si maintenant le Seigneur nous appelait à sortir dans la rue ? Combien de jeunes profitent chaque été des sessions à Paray-le-Monial, des pèlerinages à Lourdes, des temps de récollection dans les abbayes ou les Communautés Nouvelles… ? Si tous ces jeunes à la suite de ces moments forts sortaient témoigner de ce qu’ils ont vécu auprès de ceux qui ne connaissent pas Dieu ?
N’est-il donc pas arrivé le temps pour l’Église de France de vivre l’envoi en mission des 72 ? Le cardinal Vingt-Trois, quand il est arrivé à Paris, a d’emblée souligné la place de la mission dans la vie de l’Église. « Malheur à moi si je n’évangélise pas ! » nous prévient Saint Paul dans sa première Lettre aux Corinthiens (1 Co 9, 16). L’évangélisation dans la rue n’est pas une nouveauté : il y a eu les précurseurs dont Pierre Goursat, fondateur de l’Emmanuel, est sans doute une des figures les plus emblématiques. Mais aujourd’hui, ils sont encore trop peu nombreux les chrétiens qui sortent dans la rue : seulement quelques centaines cet été en France !
Le Christ n’attend pas de nous que nous ayons fait 20 semaines de retraites et 40 pèlerinages pour partir l’annoncer. C’est au chapitre 10 de l’évangile de Luc qu’a lieu l’envoi des 72. 10 sur un évangile qui en contient 24 ! Certains ne devaient connaître le Christ que depuis quelques semaines et pourtant Il les a envoyés.
Pendant la mission Anuncio de Lyon, le cardinal Barbarin a prêché sur le parvis de sa cathédrale. Alors qu’il venait de finir, voyant le micro libre, les responsables de la mission ont eu l’audace d’inviter les missionnaires à témoigner chacun à leur tour devant les passants. Ils avaient une vingtaine d’année et combien de cœurs ont été touchés. Par la suite, à Lyon toujours, à l’occasion d’une rencontre avec le père Michel Gitton, de la Communauté Aïn Karem, les jeunes se sont mis à prêcher dans la rue à l’invitation de ce dernier. Nous voilà revenus 2000 ans en arrière avec Saint Paul à Athènes ! Et là encore que de cœurs touchés !
Paul VI déclare que dans le monde moderne « paradoxalement, on ne peut pas nier l’existence de véritables pierres d’attente chrétiennes, de valeurs évangéliques au moins sous la forme d’un vide ou d’une nostalgie. Il ne serait pas exagéré de parler d’un puissant et tragique appel à être évangélisé. » (1) Comment répondre à cet appel de nos frères et sœurs qui ne connaissent pas Dieu ou qui ne savent pas qu’Il est un Dieu d’Amour sans aller directement à leur rencontre dans la rue ? C’est ce que nous ferons encore l’année prochaine du 19 au 29 août avec plus de 300 jeunes dans 10 villes de France durant la troisième édition du Festival Anuncio.
Après avoir entamé la reconstruction de Son Église qui est en France, le Seigneur n’est-il pas en train de l’inviter à sortir dans la rue afin de continuer à la faire grandir ? Si c’est le cas, nous ne devons pas craindre de prendre résolument ce virage pastoral ! Laissons pour finir la parole à nos évêques qui soulignaient en 1996 que « la pastorale dite « ordinaire », souvent vécue comme une pastorale de l’accueil doit de plus en plus devenir une pastorale de la proposition. » (2)
Arnaud ULRICH
(1) Evangelii Nuntiandi, exhortation apostolique de Paul VI sur l’évangélisation dans le monde moderne, le 8 décembre 1975, paragraphe 55.
(2) Proposer la Foi dans la Société Actuelle, lettre des évêques aux catholiques de France, Cerf.