Qui est Jésus-Christ ? La question interdite Enquête pour l’unité.
Texte et Dessins de Brunor
Editions Le Sénevé-François-Xavier de Guibert
La Trinité en bandes dessinées ? C’est le défi relevé par Brunor. Il déterre une question réputée poussiéreuse. Dans un scénario captivant, il entreprend de désensabler un sujet censé n’intéresser que quelques théologiens universitaires.
Il nous fait découvrir une épopée théologique étonnante.
En tant que telle, l’histoire du dogme de la Trinité constitue déjà un sujet passionnant. Une véritable enquête. Avec ses rebondissements et ses coups de théâtre : intrigues, déstabilisations, rivalités de lobbies, déclarations à la presse, provocations, arrestations, falsifications, interventions de l’exécutif.
On pourrait ne voir dans ces rebondissements que la trace de l’orgueil humain, cherchant à enfermer le mystère de Dieu dans des catégories philosophiques : « substance », « personne », « relation ».
On serait alors tenté de trouver sage, le décret de l’empereur Constant, interdisant en 648 un certain débat concernant la volonté humaine en Jésus-Christ… On s’épargnerait ainsi les débats acharnés contre les Gnostiques, les discussions « byzantines » sur les « hypostases », puis les arguties « scholastiques » sur la subsistance des relations.
Et pourtant, ce sont ces débats, ces discussions, ces arguties qui ont jalonné la transmission très chahutée de ce trésor de la foi.
Chaque réaction, chaque inflexion, chaque reposition du problème exprime les difficultés de l’être humain à saisir, sans le réduire, le mystère de la nature divine. Nos réticences, nos projections, nos réflexes humains, trop humains, sont mis à mal par cette extraordinaire proposition de la foi : « Dieu est unique mais non pas solitaire ».
Purifier le langage des représentations humaines. Car la Trinité n’est pas seulement un problème, c’est aussi et d’abord un mystère. Pour autant, ne gommons pas le problème. Dans le langage de l’expérience humaine, un père et un fils ne sont pas seulement deux personnes distinctes, mais ils sont deux êtres distincts. Et ce que nous nommons couramment un esprit, c’est une faculté, pas un être à part entière (sauf dans les histoires de revenants). Affirmer que Dieu est un seul être, mais qu’il y a trois personnes, et les nommer le « Père », « le Fils » , « l’Esprit « , demande donc quelques explications.
En outre, les choses se compliquent, du fait que la « deuxième personne de la Trinité « , appelée « Fils de Dieu », connaît aussi une naissance temporelle dans le sein de la Vierge Marie.
Brunor débrouille avec enthousiasme le mélange des langages issus de traditions et d’approches différentes et complémentaires. Pourquoi la Parole de Dieu, son « Logos » a-t-elle été appelée Fils de Dieu ? L’affaire est assez complexe, avouons-le. N’y a -t-il pas là-dessous beaucoup de complications inutiles ? Oui et non. Ces subtilités métaphysiques nous rappellent aussi que l’absolue simplicité de Dieu échappe à nos paroles humaines : « Dieu transcende toute créature. Il faut donc sans cesse purifier notre langage de ce qu’il a de limité, d’imagé, d’imparfait pour ne pas confondre le Dieu « ineffable, invisible, incompréhensible, insaisissable » avec nos représentations humaines. Nos paroles humaines restent toujours en deçà du mystère de Dieu » (Catéchisme de l’Eglise catholique, n°32).
Brunor nous invite à purifier notre langage, en signalant, avec humour, tout ce qui revient à caricaturer Dieu.
Pourquoi la Trinité ?
Si l’on vous demandait quel est le mystère central de la foi chrétienne, que répondriez-vous ?
Honnêtement, j’aurais tendance à répondre que c’est la Résurrection du Christ.
De fait, si le Christ n’était pas ressuscité, s’il n’avait pas triomphé de la mort, ce ne serait qu’un sage parmi d’autres.
« Si le Christ n’est pas ressuscité, vaine est notre foi » déclare Saint Paul.
Mais cela ne suffit pas à faire de la Résurrection de, Jésus le mystère central.
Alors, quel est ce mystère ? L’Incarnation ? L’Eucharistie ?
Ecoutons la réponse qu’ose le Catéchisme de l’Eglise Catholique : « Le mystère de la Très Sainte Trinité est le mystère central de la foi et de la vie chrétienne. Il est le mystère de Dieu en Lui-même. Il est donc la source de tous les autres mystères de la foi, lumière qui les illumine. » (n°234) .
« La foi de tous les chrétiens, affirmait déjà S. Césaire d’Arles, repose sur la Trinité. »
Mystère central ? Oui, car il remet Dieu au centre. « La raison d’aimer Dieu, dit saint Bernard, c’est Dieu Lui-même ».
Si nous n’aimons Dieu que pour ses bienfaits, notre amour risquera d’être intéressé, et comme – avouons-le- ses bienfaits ne nous apparaissent pas toujours, notre amour risque de s’affaiblir, de s’éteindre.
Aimer quelqu’un, c’est l’aimer pour lui-même.
Et si ce quelqu’un est le Bien en personne, qui se diffuse Lui-même au point d’être par Lui-même don, source débordante, courant et fleuve, alors le bienfait suprême sera de nous centrer sur Lui.
Brunor est donc bien inspiré de nous inviter à nous recentrer sur l’essentiel, à entrer, à travers l’histoire d’un dogme âprement débattu, dans la contemplation de Celui qui nous a faits de rien, mais ne nous a pas faits pour rien.
La Trinité est le grand rendez-vous de notre vie. Ce livre est une invitation à ce rendez-vous d’amour.
Paul CLAVIER
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Paul Clavier, normalien, agrégé et Docteur en philosophie, enseigne à l’Ecole Normale Supérieure, rue d’Ulm, à Paris. Il est l’auteur de plusieurs livres :
La Cote Argus des Valeurs Morales
Qu’est-ce que la théologie naturelle ? Dieu Sans Barbe.
Le Concept de Monde. La Raison.
Kant, les Idées cosmologiques…
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http://www.france-catholique.fr/La-Question-Interdite-Enquete.html