Les très rapides événements survenus à Gaza le vendredi 14 août sont riches d’enseignements. Rappelons qu’un groupe musulman extrémiste, qui avait cru pouvoir profiter de la prière du vendredi pour déstabiliser le Hamas qui y règne en maître a été très rapidement et sans pitié éliminé par les forces de l’ordre de ce territoire palestinien. Le cheikh Abdelatif Moussa — encore appelé de son nom de guerre Abou al-Nour al-Maqdessi —, chef d’un groupuscule apparu à Gaza il y a tout juste neuf mois, a proclamé « la naissance de l’émirat islamique », autrement dit la mise en place d’une véritable théocratie. Tandis que le « ministre de l’Intérieur », Fathi al-Masri, le traitait de « fou », l’assaut était donné, le prédicateur barbu disparaissant dans l’explosion de sa maison.
Ces « soldats d’Allah » étaient apparus il y a tout juste neuf mois à Gaza. Ils relèvent de ce qu’on appelle la mouvance salafiste, autrement dit les intégristes sunnites tels qu’on les trouve au Maghreb et particulièrement en Algérie — ce sont eux qui sont crédités de l’assassinat des sept moines français de Tibhérine en 1996. À ce titre, ils sont considérés comme proches d’al-Qaida, mais ils ne sont pas les seuls à Gaza, où s’est développée une contestation du Hamas.
C’est en effet la première leçon à tirer de cette tentative d’insurrection et de son écrasement. Le Hamas, qui continue à narguer l’Autorité palestinienne de Mahmoud Abbas, à défier Israël et à susciter l’hostilité non seulement des Occidentaux mais aussi des pays arabes modérés, vient de trouver plus intransigeant que lui, puisqu’il est accusé à son tour de mollesse, d’inefficacité et de corruption.
Cela signifie aussi que l’opération contre les « soldats d’Allah » n’a pu que ravir Israël, l’Autorité palestinienne et tous ceux qui croient à un règlement pacifique du conflit entre les Arabes et les « sionistes ». De là à dire que des accords et des collaborations même épisodiques pourraient s’instaurer entre les services secrets des diverses parties prenantes, il y a évidemment encore un fossé, mais il pourrait être franchi par certains — y compris en Israël et à Gaza, où l’on observe un cessez-le-feu depuis le début de l’année. Le Hamas n’est certes pas un tendre et il a instauré un ordre moral fondé sur certaines habitudes musulmanes ; pourtant, sa problématique se présente comme exclusivement palestinienne — à ce titre, il accepte un processus électoral — et il ne s’occupe pas de concourir à une révolution mondiale au profit de l’islam.
Du coup, les voisins égyptien et israélien préfèrent forcément le Hamas à une anarchie favorisant les islamistes les plus intransigeants. Il ne faut en effet pas oublier que le siège des « soldats d’Allah » se trouvait à Rafah, dans l’extrême sud de la bande de Gaza, là où arrivent les fameux tunnels qui traversent la frontière égyptienne et qui permettent toutes sortes d’infiltrations, véhémentement dénoncées par Israël mais qui indisposent aussi l’Égypte et l’Autorité palestinienne.