Au terme de plusieurs années de réflexion, la Commission théologique internationale vient de publier un texte important, sous le titre « À la recherche d’une éthique universelle ». C’est le cardinal Ratzinger, alors qu’il était encore préfet de la Congrégation pour la doctrine de la Foi, qui avait soumis ce thème à la sagacité de cette institution où ont toujours siégé, depuis sa fondation, les théologiens les plus éminents. On comprend le souci qui avait imposé pareil choix. La gravité des débats sur le devenir de l’homme, l’importance des décisions à prendre à l’initiative des États et des instances mondiales ont remis à jour la nécessité de s’accorder sur des principes universels qui assurent l’intégrité de la personne humaine, face aux risques d’instrumentalisation et de déshumanisation. Ces risques ne sont pas perçus et dénoncés par les seuls chrétiens. Aussi, le professeur Jacques Testart, dénonçait encore cette semaine l’action des « cannibales et marchands à la recherche de l’embryon » (Libération, 27 avril).
L’Église catholique, par la voix de ses théologiens, invite à un dialogue de toutes les traditions et de toutes les cultures. Elle est persuadée, en vertu des convictions que lui confère la lumière de la Révélation sur la situation singulière de l’homme, que celui-ci est sa propre référence en dépit de la diversité des enracinements et des évolutions temporelles. En d’autres termes, il existe une nature humaine spécifique et celle-ci doit être respectée dans ses principes fondateurs, accessibles à la raison. Pourtant, depuis des décennies, toute une culture d’inspiration individualiste récuse toute possibilité d’accord philosophique au motif de l’hétérogénéité des langages ou de la primauté d’une esthétique de la construction de soi. Dans ces conditions, c’est la solidité des droits de l’homme et des grandes déclarations qui se trouve en péril. L’Église a senti la menace et propose aux hommes et aux femmes de bonne volonté de s’engager dans une démarche de salut commun.
Certes, avant même que la commission internationale ait publié le résultat de ses travaux, ceux-ci étaient contestés et la notion de loi naturelle récusée pour son appartenance à une thématique aristotélico-thomiste étrangère aux conceptions modernes. Précisément, n’est-ce pas la persistance de cette pensée, en dépit de toutes les « déconstructions » qui établit sa pertinence toujours ravivée ? Par ailleurs, l’appel aux experts de tous les courants religieux, sapientiels ou philosophiques à procéder à un travail analogue « afin d’aboutir à la reconnaissance commune des normes universelles » ne constitue-t-il pas une marque de confiance envers tous les hommes, participant d’une même nature profonde et appelés à une vocation où tous peuvent se retrouver.
Gérard LECLERC
À la recherche d’une éthique universelle, nouveau regard sur la loi naturelle, préface de Mgr Minnerath, introduction du Père Serge Thomas Bonino, Cerf, 80 pages, 18 e.
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