Le Vatican coupable... (N'a pas été publié dans FC) - France Catholique
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Le martyre des carmélites
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Le Vatican coupable… (N’a pas été publié dans FC)

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17 FEVRIER

Nouvelle contribution au blog de La Croix (17 février) auquel je donne une « analyse girardienne de la crise ». Il y a un peu de provocation à proposer ainsi un point de vue qui bouscule les lignes imposées. L’opinion correcte veut que le Vatican soit « coupable » dans l’affaire qui mêle la levée des excommunications et la déclaration Williamson, de diverses façons. Coupable de vouloir réintégrer des gens insupportables et donc de mettre l’héritage de Vatican II en danger. Coupable de mauvaise communication pour avoir mal géré la crise médiatique ; coupable de gouverner l’Église en rupture de modernité et de progressisme. Incroyable comme les procureurs s’échauffent et comme ils sont légion. Mon idée rompt avec cette logique de la culpabilité pour étudier le fonctionnement de la crise et de la violence qu’elle dégage. La méthode de René Girard me paraît pertinente pour faire ressortir la génératrice de la montée en puissance d’un phénomène médiatique tel que celui-là.

J’observe que l’épicentre de la crise est en Allemagne où elle atteint un degré plus intense qu’ailleurs. C’est dans ce pays que la désignation du Pape comme coupable a été la plus vindicative, du fait notamment du rôle du Spiegel dans la campagne de mobilisation des émotions (« Un pape qui fait du mal à son Église »). C’est aussi le pays où le pouvoir politique s’est cru en droit d’interpeller le Vatican par la bouche de la chancelière Angela Merkel. C’est encore le pays où l’épiscopat apparaît le plus divisé et le plus mal à l’aise à l’égard du Pape. Quelques contradicteurs me reprochent de ressortir la vieille thèse du complot sous le masque de la crise mimétique. Mais précisément, je ne dénonce aucun complot qui relèverait d’une stratégie réfléchie et cohérente. Je relève simplement des symptômes et je constate que l’Allemagne a un problème avec Ratzinger et que cela vaut la peine d’être analysé. Pour cela, la réflexion de Max Scheler sur le ressentiment est un auxiliaire précieux ainsi que le rappel des complexes historiques qui nouent l’inconscient culturel d’un pays. Je ne tiens pas à rouvrir les plaies anciennes, je constate qu’elles sont toujours vives dans la mémoire allemande.

Que l’on prenne pour cible ce pape allemand mais bavarois n’est nullement anodin. On sait parfaitement que son père a toujours manifesté le plus grand dégoût à l’égard des nazis et de leur régime, que lui-même partageait le même sentiment et qu’il a salué la défaite d’Hitler comme une libération. Mais le scandale Williamson était une trop belle aubaine pour ceux qui voulaient régler leurs comptes qui concernent un passé qu’on n’a nulle envie d’élucider pour lui-même. Il suffit d’avoir exploré, si peu que ce soit, la vie intellectuelle pour savoir que l’antijudaïsme est une tendance forte de l’érudition protestante allemande. Vouloir obstinément rejeter tout l’opprobre sur le catholicisme, ne serait-ce qu’en stigmatisant le seul Pie XII pour son attitude durant la guerre, relève d’un réflexe à interroger sérieusement. Il est plus que troublant que l’opération du Vicaire continue à se perpétuer indéfiniment, alors que l’on sait que le pape Pacelli est la seule personnalité majeure de l’époque qui se soit concrètement soucié de la tragédie du peuple juif.