3120-L'affaire Pierra - France Catholique
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3120-L’affaire Pierra

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Ceux qui veulent faire évoluer la loi Leonetti dans le sens de l’injection létale exploitent sa faille principale : la possibilité de provoquer l’euthanasie par arrêt d’alimentation et d’hydratation.

Hervé pierra est mort le 12 novembre 2006 à l’âge de 29 ans, huit ans après une pendaison « ratée ». Pareille mort pourrait légitimer de multiples procès.

1/ Celui du cannabis que le jeune homme avait régulièrement consommé : on peut se demander s’il n’est pas à l’origine de la schizophrénie pour laquelle on sait qu’il avait déjà dû être hospitalisé six mois, et qui le faisait tant souffrir.

2/ Celui, peut-être, de l’accompagnement social de cette désespérance : la pendaison du jeune homme était sa troisième tentative de suicide. Selon le témoignage de sa petite amie, ses médicaments avaient provoqué son impuissance. Cet effet secondaire aurait achevé de le désespérer, alors qu’il reprenait le dessus dans sa carrière militaire.

3/ Celui, certainement, du dispositif de prise en charge au long cours des personnes en situation de coma végétatif. C’est l’état dans lequel Hervé s’est retrouvé, son père, capitaine des pompiers de Paris, lui ayant prodigué, avec ses collèges, des gestes intensifs de réanimation : massage cardiaque, bouche à bouche et électrochoc. Cet acharnement l’avait « sauvé ». à en croire ses parents, qui n’ont pas ménagé leurs forces pour le ramener à la conscience, Hervé Pierra aurait ensuite échoué dans un « mouroir » rempli de personnes âgées. Ainsi désignent-ils le centre de long séjour où il fut hospitalisé plusieurs années, à Saumur, tandis que son corps se « rabougrissait », conséquence de l’alitement.

4/ Celui de l’affaire Hum­bert enfin puisque la mort d’Hervé Pierra peut être considérée comme un dégât collatéral de celle de Vincent, et de la loi fin de vie qui a suivi. Les époux Pier­ra s’étaient en effet engagés comme militants dans les deux associations épousant la cause de Marie Humbert : Association pour le Droit de Mourir dans la Dignité (ADMD) et Faut qu’on s’active. à ce titre, ils réclament aux équipes médicales du centre de long séjour où vit leur fils qu’elles mettent en œuvre une disposition de la loi Leonetti qu’ils pensent susceptible de mettre fin à ses jours : l’arrêt de son alimentation et de son hydratation.

Cette loi affirme que ce sont des traitements, précisant que ces derniers peuvent être interrompus. Une telle assimilation est abusive : au même titre que la toilette ou autres soins de « nursing » ce sont des soins toujours dus aux patients. C’est d’ailleurs la réponse de bon sens opposée par les soignants de Saumur. Car on leur demandait, ni plus ni moins, d’euthanasier le jeune homme. Voilà qu’une équipe d’éthiciens d’un hôpital parisien cautionne la demande des parents en s’appuyant sur la loi Leonetti. Les soignants résistent encore. Un procureur est saisi. Régis Aubry, président du Comité National de Développement des Soins Palliatifs, donne à son tour son aval à l’arrêt d’alimentation et d’hydratation. N’est-ce pas le véritable scandale de l’affaire ? Les soignants locaux doivent se soumettre.

Le résultat est catastrophique : les parents assistent à six jours d’agonie de leur fils marquée par de vio­lentes convulsions. Après s’être battus pour obtenir de la médecine ce qu’elle ne voulait pas prodiguer, les parents re­tournent leur colère contre la disposition de la loi dont ils ont imposé l’application. La ficelle est grosse, mais qui oserait s’opposer à leur poignant témoignage ?

Ceux qui ont soutenu la démarche des parents, contre l’avis de l’équipe médicale, se divisent. Pour Régis Aubry, « L’affaire Pierra est l’exemple typique d’une mauvaise application de la loi Leonetti » : il aurait fallu continuer les autres soins et accompagner les parents en leur expliquant que leur fils ne souffrait pas, plutôt que de les abandonner. Mais eux persistent dans une autre analyse : ils réclament la légalisation de l’injection létale.
L’avocat de Chantal Sébire, également vice-président de l’ADMD, vient de publier un livre en ce sens : Moi, Hervé Pierra, ayant mis six jours à mourir. On retrouve la technique, utilisée dans l’affaire Humbert, de faire parler une personne incapable de s’exprimer par elle-même.

Ce qui est devenu l’affaire Pierra a ainsi glissé vers le faux débat « au milieu du gué ». Des « techniciens » des soins palliatifs à l’image de Régis Aubry critiquent l’incompétence d’une équipe médicale qui aurait dû, estiment-ils, administrer au jeune Hervé de quoi stopper ses convulsions. Mais ils ne contestent plus l’arrêt d’alimentation. Grave dérive.
Plus grave encore, c’est la restriction imposée par la loi Leonetti que Maître An­thonovitz conteste, la jugeant « hypocrite ». Selon lui, la seule solution pour éviter « la mort de faim et de soif » c’est d’autoriser un geste létal direct.

Comble de mauvaise foi, en obtenant la possibilité de pratiquer l’arrêt d’alimentation et d’hydratation les partisans de l’euthanasie ont franchi l’étape qu’ils prévoyaient. Ils exploitent maintenant le scandale de cette mort, et la détresse de parents endeuillés, en orientant leur colère dans le mauvais sens.

Le fiasco de la mort d’Hervé Pierra montre que l’alimentation et l’hydratation n’auraient jamais dû quitter leur statut de soins.
Voilà les adversaires de l’euthanasie contraints de défendre une loi imparfaite, contre la menace de son ag­gravation.