Mieux vaut en être conscient, le téléfilm que diffusera TF1, le lundi 3 décembre à 20h50 s’inscrit dans une offensive, épisode singulièrement dangereux d’un plan d’ensemble pour obtenir l’euthanasie légale. Le piège tendu à notre émotion est résumé par un titre : « Marie Humbert : l’amour d’une mère ». On connaît l’issue du drame de Berck-sur-Mer avec la mort de Vincent le 26 septembre 2003. Cette fin venait d’être annoncée par cette femme éprouvée, déjà sur TF1. Trois ans, jour pour jour, après l’accident de son fils, elle passait à l’acte, sans parvenir à ses fins. Pouvait-elle reculer à la veille de la sortie du livre qu’on prétendait qu’il avait dicté ? Deux jours plus tard, un réanimateur paniqué administrait deux injections létales au jeune homme qui sortait du coma. Et les Français presque unanimes de se réjouir de l’épilogue. On n’avait pas cessé de leur dire que la vie de Vincent était invivable. Une mère devenait missionnaire de la mort administrée « par amour ».
Seules fausses-notes dans le concert de louanges qui faisait d’elle une sainte laïque, la parole des soignants de l’hôpital Héliomarin de Berck qui avaient connu et aimé Vincent Humbert. Ils avaient assisté, impuissants, à l’égarement d’une femme manipulée par des associations. Après la mort de Vincent, c’est à eux qu’il revint de rassurer les patients et les familles qui ont pu croire qu’on mettrait aussi fin à leurs jours.
Le témoignage des médecins et d’un kinésithérapeute fut brièvement évoqué par quelques médias courageux (Le Quotidien du Médecin, La Croix…) avant que ne retombe la chape de plomb de l’Histoire officielle. Or c’est cette interprétation biaisée que vont subir des millions de télé-spectateurs. Ne cachant pas sa volonté de rouvrir le débat sur l’euthanasie, le réalisateur du téléfilm a pris soin de ne conserver pour ses personnages que les vrais noms de ceux qui cautionnent la mort de Vincent. Réduits au silence ou à la caricature, les autres ne peuvent se défendre.
Séquence après séquence, il s’agit de nous noyer dans les larmes de ce que Jean-Paul II a osé nommer « la pitié fallacieuse », celle qui, plutôt que de leur venir en aide, nous fait nier le sens de la vie de ceux qui endurent une épreuve. Celle de Vincent n’était pas des moindres. Mais elle n’était pas ce qu’on nous en dit aujourd’hui. Auprès des témoins occultés, on prend la mesure du mensonge sur la situation réelle du jeune homme : il n’était ni tétraplégique, ni aveugle ; il n’éprouvait pas de souffrance physique… Toutes les aides qui ont été proposées à sa mère ont été refusées, y compris une place dans une Maison d’Accueil Spécialisée flambant neuve, sans même que Vincent ait pu la visiter. La véritable histoire de l’affaire Humbert reste à raconter : solitude d’une mère, absence du père, confusion des sentiments, déni des troubles du comportement, orchestration médiatique, manipulation de l’opinion…
La diffusion de cette fiction engagée, se joue comme une nouvelle vague d’assaut. On parle de deux cent mille pétitionnaires en faveur de l’euthanasie. Pendant ce temps à Berck-sur-Mer, des soignants, d’autres grands accidentés et leurs familles continuent discrètement de se battre pour la vie. Hommage leur soit rendu.
Tugdual DERVILLE