La Semaine Sainte est toujours l’occasion d’un retour sur Rome dont l’extrême visibilité constitue un repère exceptionnel, même pour les plus irréductibles opposants à un message religieux. Benoît XVI n’est pas Jean-Paul II, mais son autorité morale est analogue. L’hostilité patente de tout un milieu intellectuel et journalistique qui s’était manifesté au moment de son élection, n’a pu se communiquer à l’ensemble de l’opinion pourtant perméable à l’intoxication idéologique. Pour plusieurs raisons. Déjà le cardinal Ratzinger impressionnait par son intelligence, sa rigueur, qui n’avait rien de “rigide”, son authentique ouverture à tous les débats qui avait pour répondant le refus des accommodements faciles et la fidélité aux exigences de la foi. Ceux qui manifestent des réticences face à l’inflexibilité de l’Eglise sur certaines questions morales paraissent disposés à comprendre, en même temps, que l’acceptation par elle des facilités du relativisme ne leur rendrait pas service, bien au contraire. Le christianisme est quelque chose de trop sérieux pour se prêter aux complaisances du moment et la dissolution d’un message enraciné dans une culture dont tous sont héritiers d’une façon ou d’une autre, ne serait au fond pas acceptée. Benoît XVI incarne donc cette continuité vivante, impressionnante en raison des oppositions qui ne la font pas céder, précieuse en raison du réconfort qu’elle apporte à une période d’incertitude dont la tentation s’appelle “- à quoi bon ?”
On aurait pu légitimement escompter qu’après l’épreuve des dernières années, souvent douloureuses, de Jean-Paul II, les cardinaux choisissent un successeur plus jeune, empli de cette incroyable énergie du pape polonais du n’ayez pas peur qui bouleversait la face du monde. Le fait qu’ils aient préféré donner leur confiance au compagnon permanent du défunt pape, avancé en âge, réticent même à la perspective d’une charge aussi redoutable, constitue un signe en soi-même qu’il nous faut interroger un an encore après l’avènement de Benoît XVI. Face à Dieu, dans l’intimité de leur conscience et la perception redoutable de leur commune responsabilité, ces hommes éminents ont décidé d’élire Joseph Ratzinger comme le plus apte à exercer le magistère suprême en période d’incertitude pour l’humanité. Celle-ci a besoin d’un évêque de Rome, éclairé de sagesse surnaturelle alliée à une grande lucidité spéculative et pratique, Benoît XVI n’a pas pris encore de décision déterminante dans le gouvernement central de l’Eglise catholique, même s’il a indiqué quelques directions à prendre. Il a surtout assuré la mission que l’on attendait de lui, à travers un enseignement d’une limpidité extrême qui allie profondeur et accessibilité. Dans un monde qui ne réagit qu’aux sollicitations ambiguës de la séduction, il ne s’adresse qu’à ce qu’il y a de plus réfléchi en nous et de plus sensible à notre capacité d’entrer dans l’intelligence du mystère révélé. Non seulement, notre attente n’a pas été déçue, mais on perçoit qu’un mouvement de fond se dessine, montrant que Benoît XVI touche les esprits et les cœurs.
Gérard LECLERC
Pour aller plus loin :
- Vladimir Ghika : le contexte politique avant la guerre de 1914-1918
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- La paternité-maternité spirituelle en vie monastique est-elle menacée en Occident ?
- Jean-Paul Hyvernat