3004-La paix promise de Noël - France Catholique
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Le martyre des carmélites
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3004-La paix promise de Noël

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Depuis toujours, la nativité du Sauveur est associée au don de la paix. C’est l’évangéliste saint Luc qui établit cette relation dans son récit, en mettant en scène “une troupe nombreuse de l’armée céleste qui louait Dieu en disant : Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes qu’Il aime”. Depuis la plus tendre enfance, les chrétiens mémorisent ces paroles reprises chaque dimanche dans la liturgie. Et Noël est le plus souvent, notamment dans les messages pontificaux, l’occasion d’intercéder pour la paix universelle. C’est que l’Eglise est en garde d’un trésor de foi impérissable qui renvoie à l’ampleur totale de la Révélation. Les esprits forts ont cru bon d’évacuer les prétendues mythologies des Evangiles de l’enfance, associées dans le meilleur des cas à la naissance des dieux païens (Eugen Drewermann par exemple), alors que Noël permettait précisément la sortie d’une mythologie enserrée dans les sortilèges de la violence.

C’est René Girard qui nous a permis, en nos temps modernes et scientifiques, de distinguer la radicale originalité de la nativité du fils de Dieu, en analogie directe avec son grand travail sur la Rédemption. De même que l’agneau immolé pour le salut du monde ouvre une ère nouvelle contraire à la logique du bouc émissaire, de même l’enfant issu de la conception virginale de Marie se distingue des dieux toujours engendrés dans la violence. Il y a déjà presque trois décennies que René Girard le démontrait dans son ouvrage fondamental, Les choses cachées depuis les fondations du monde. (Grasset, 1978). Et il n’a cessé depuis lors d’approfondir et de préciser ses analyses dans sa démarche de chercheur dont la rigueur s’est toujours trouvée en correspondance avec la foi la plus orthodoxe.

C’est une telle cohérence, si rare et si précieuse, qui permettait, le jeudi 15 décembre, sous la Coupole, à Michel Serres de reconnaître en son frère et ami René Girard à la fois “le Darwin des sciences humaines et un Père de l’Eglise”. La force de l’éloge était d’autant plus impressionnante qu’il s’adressait à un homme d’une humilité remarquable et qui n’avait présenté sa candidature à l’Académie que parce qu’elle est une institution traditionnelle, accueillante au savoir et à la sagesse, en dehors des phéno-mènes tapageurs de la mode. Pour tous ceux qui en furent témoins, cette réception restera gravée dans leur souvenir comme un moment exceptionnel. Le nouvel académicien avait su montrer dans son prédécesseur, le Père Carré, fils de Saint-Dominique, un mystique préoccupé de la seule recherche du Dieu vivant. Michel Serres, en présentant l’œuvre de son ami, concluait avec les accents de Léon Bloy sur l’unique nécessité d’être des saints. Contre la violence universelle issue d’un péché originel qui fait de tous les individus les émules de Caïn face à Abel, il y a l’unique grâce de la sainteté, celle chantée par les anges à Noël et qui résulte du seul Amour donné et répandu pour les hommes de bonne volonté.

Gérard LECLERC