2957-Le Tout Autre et le Tout Proche - France Catholique
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Le martyre des carmélites
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2957-Le Tout Autre et le Tout Proche

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Dans un de ses célèbres sermons, prononcés alors qu’il n’est pas encore entré dans l’Eglise catholique, John-Henry Newman, voulant célébrer la grandeur de la Nativité, se concentre sur un seul verset de l’Evangile de saint Jean : “Le Verbe s’est fait chair, et il a habité parmi nous” (Jn1,14). Certes, les récits circonstanciés de Marc et de Luc nous sont également nécessaires pour connaître les éléments concrets, historiques, de l’Incarnation. Le nom vénérable de Marie nous est indispensable pour comprendre l’économie de la Venue du Fils. Faut-il le redire à un moment où l’épiscopat français se trouve dans l’obligation de rappeler l’enseignement dogmatique de l’Eglise, sans lequel la foi est sans repères solides et le mystère chrétien atteint dans sa substance ? Mais, précisément, l’extrême concentration théologique de Jean nous est précieuse pour que nous puissions méditer directement le cœur de l’événement de Bethléem.

Dans sa concision, le quatrième évangéliste fait entendre, de la façon la plus saisissante, l’inouï de l’Incarnation. C’est le Verbe qui est en Dieu qui se fait chair. Cet avènement – Jean le précise explicitement – ne se réfère qu’au seul décret divin. Sans raconter, comme Matthieu et Luc, les circonstances de la conception et de la naissance de Jésus, il se trouve en accord total avec eux : “Lui (Jésus) que ni sang, ni vouloir de chair, ni vouloir d’homme, mais Dieu a engendré” (Jn1,13). L’obstination de tels essayistes contemporains à vouloir faire entrer l’Incarnation dans les normes biologiques habituelles est donc non seulement prise en défaut, elle s’avère contraire à la nature même de l’événement. Jésus n’est pas né de l’initiative d’un couple humain, mais du seul dessein trinitaire, de l’infinie bienveillance du Père, de l’obéissance parfaite du Fils, de l’action de l’Esprit.

Newman insiste sur l’article du Crédo : “conçu du Saint-Esprit, né de la Vierge Marie”. A l’époque où il prononce son sermon, il n’est pas catholique et le dogme de l’Immaculée Conception n’a pas encore été promulgué. C’est pourquoi, une certaine hésitation apparaît chez lui, qui appelle cette précision dogmatique. Car si Marie a été mise à part “comme un jardin clos, une source fermée, une fontaine scellée”, c’est qu’elle avait, d’évidence, échappé à la faute originelle, afin de donner “une nature créée à celui qui était son Créateur”. Ainsi s’accomplit, de la façon la plus inattendue et la plus merveilleuse, la Promesse biblique du Salut et l’accomplissement ultime de l’Alliance. Le Dieu de la Bible est, en effet, le Tout Autre, et sa transcendance le met hors de prise de toute équivoque idolâtrique. Mais ce Tout Autre est également le Tout Proche, celui dont l’amour infini pour sa créature rend capable de la plus grande des proximités. Il a habité parmi nous ! Mystère total, vérité adorable que les chants des anges et la ferveur chrétienne font entrer dans nos cœurs. “Un enfant nous est né… éternelle est sa puissance !”

Gérard LECLERC