La volonté du président des Etats-Unis de lancer une expédition punitive contre l’Irak, indépendamment de tout mandat de l’ONU, soulève de graves objections de conscience. La voix de Jean-Paul II a retenti avec force lors de son allocution du début d’année aux ambassadeurs auprès du Saint-Siège. On se souvient que déjà, au moment de la guerre du Golfe, le Saint-Père avait exprimé sa tristesse qu’on en soit directement allé au conflit armé sans avoir utilisé tous les moyens de médiation possibles. Avec le recul du temps, on mesure mieux sa lucidité. En effet, à l’époque, il y avait très peu de monde à s’opposer aux arguments d’une guerre en faveur du droit. Et certes le Koweït fut libéré de l’occupation irakienne. Mais à quel prix ! Combien de victimes civiles dans cette « guerre propre », qui prétendait réaliser la performance du minimum de pertes de vies militaires ?
Un cruel embargo s’acharne depuis douze ans sur la population irakienne, provoquant une mortalité infantile insupportable. Qu’une nouvelle guerre de représailles éclate, et à nouveau ce seront les plus humbles, les plus démunis qui souffriront. Jean-Paul II ne cesse de le répéter : « La guerre n’est jamais un moyen comme un autre pour régler les différends entre les nations. » Elle n’est jamais une fatalité. « Comme le rappellent la charte des Nations unies et le droit international, on ne peut s’y résoudre, même s’il s’agit d’assurer le bien commun, qu’à la dernière extrémité et selon des conditions très strictes, sans négliger les conséquences pour les populations civiles durant et après les opérations. »
A l’angoisse pour l’Irak s’ajoute celle pour l’avenir de la Côte d’Ivoire. Les liens très profonds qui nous unissent à ce pays, qui fut durant des années un modèle d’unité et de prospérité, nous rendent attentifs à l’enchaînement de crises qui pourrait déboucher sur des guerres civiles inexpiables. La conférence qui réunit en ce moment dans la région parisienne tous les protagonistes des actuels affrontements doit absolument déboucher sur un accord. Celui-ci suppose de la part de chacun des concessions, sans doute difficiles mais indispensables. Si la Côte d’Ivoire sombrait dans l’anarchie, c’est toute l’Afrique de l’Ouest qui serait déstabilisée. La mobilisation pour la paix est pour les chrétiens un impératif absolu. Elle s’inscrit dans la logique de cet engagement politique dont le cardinal Ratzinger vient de rappeler l’importance vitale.
Gérard LECLERC